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dans de telles conditions, tenter une restauration de cet ensemble architectural serait faire œuvre de pure fantaisie.


II

Le palais n’est qu’une maison plus belle et plus grande que les autres ; c’est une maison qui se distingue des habitations privées par ses dimensions et par le luxe de sa décoration. Sous cette réserve, les observations que nous a suggérées le palais s’appliquent à la maison. Le simple particulier, dans la mesure des ressources dont il disposait, devait tenir à s’assurer les mêmes commodités et les mêmes agrémens que le souverain et que les princes héréditaires des nomes. La construction et l’aménagement de sa demeure devaient s’inspirer des mêmes nécessités, répondre à des habitudes semblables et tenir compte des mêmes conditions de milieu et de climat ; la maison était une réduction du palais.

Si, comme nous le disent Diodore et Josèphe, la population de l’Égypte proprement dite, d’Alexandrie à Philœ, montait encore, dans le premier siècle de l’empire romain, à sept millions d’âmes, il y a lieu de croire que l’Égypte était plus peuplée au temps de sa plus grande prospérité, ainsi par exemple sous les princes de la XVIIIe et de la XIXe dynastie[1]. Une grande partie du peuple égyptien vivait dans des bourgs et dans de petites villes ouvertes ; il y avait, de plus, sur certains points, des agglomérations urbaines très considérables. Sais, Memphis et Thèbes étaient de fort grandes villes ; tout nous le prouve, la manière dont en parlent les anciens, le vaste espace que couvrent les ruines de ces cités et l’étendue de leurs nécropoles.

Les textes, grecs ou égyptiens, ne nous fournissent d’ailleurs presque aucun renseignement sur l’aspect des villes égyptiennes et sur la manière dont les bâtimens s’y groupaient, non plus que sur les dimensions moyennes que présentaient, en hauteur et en largeur, les habitations urbaines. Les voyageurs grecs ne paraissent pas avoir rien vu là dont ils fussent assez frappés pour croire utile d’en garder le souvenir. Pour ce qui est de l’emplacement des villes antiques, on ne l’a guère étudié encore à ce point de vue, et peut-être n’y a-t-il pas lieu de beaucoup compter, à cet égard, sur les résultats de recherches ultérieures. En tout pays, la maison est d’ordinaire faite de petits matériaux ; elle ne résiste donc pas à

  1. Diodore, I, 31, 6. Josèphe (la Guerre des Juifs, II, 16, 4) parle de sept millions cinq cent mille âmes, sans compter les habitans d’Alexandrie.