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reste une politique d’expédiens hasardeux qui épuise tout pour vivre ou plutôt pour briller, qui force et use tous les ressorte dans un intérêt de vaine popularité.

L’été, quand des circonstances extraordinaires et imprévues ne mettent pas l’Europe sous les armes ou dans l’attente des grands événemens, l’été est d’habitude la saison des trêves, des dispersions et des voyages. Ce n’est pas cependant que la politique sommeille entièrement, que les préoccupations cessent et que les affaires des peuples s’arrêtent. A travers tout, jusque dans cette saison du repos qui revient périodiquement, la vie européenne suit son cours, et tous les pays, tous les gouvernemens ont leur contingent d’œuvres à poursuivre, de questions à résoudre, sans parler des embarras qu’ils se créent souvent à eux-mêmes.

Avant de prendre ses vacances, le monde politique anglais ne laisse pas de se montrer un peu agité. Il a eu d’abord pendant quelques mois sa grande affaire d’Irlande, ce « land-bill, » auquel M » Gladstone a consacré ses dernières forces avec une infatigable persévérance, et depuis quelques semaines le cabinet représenté par lord Granville ou sir Charles Dilke a sans cesse à répondre à des interpellations irritantes au sujet des entreprises françaises dans la Tunisie. L’Angleterre n’a qu’une chose qui la préoccupe autant que les affaires tunisiennes, c’est le traité de commerce qui va être un objet de négociations et franchement, si ces questions ont leur importance, elles ne sont pas, elles ne devraient pas être de nature à susciter des ombrages entre les deux nations. Dans l’empire autrichien, la Hongrie est à peine remise des élections qui viennent de renouveler le parlement hongrois, qui ont donné au cabinet de Pesth et à son chef M. Tisza une majorité décidée. Au centre de l’Europe, en Allemagne, aujourd’hui comme hier, tout tourne autour de M. de Bismarck, qui depuis quelques jours a pris ses quartiers d’été à Kissingen, tandis que l’empereur Guillaume est à Gastein, où il parait de voir se rencontrer avec l’empereur François-Joseph d’Autriche. A vrai dire, dans les conditions présentes, dans l’état des rapports établis depuis quelques années entre l’Allemagne et l’Autriche, ces visites ou entrevues impériales n’ont plus la signification et l’importance qu’elles auraient pu avoir en d’autres momens ; elles ne sont qu’un signe de plus de l’alliance devenue comme un système permanent pour les deux empires, et dans sa retraite momentanée de Kissingen, M. de Bismarck n’en est plus sans doute à chercher de nouvelles combinaisons diplomatiques pour la sûreté de son œuvre. Il n’en a pas besoin ! de quoi s’inquiéterait-il ? La situation de l’Europe, telle qu’elle est, telle qu’il a contribué à la créer, est faite pour le rassurer. L’Autriche lui est attachée et cherche sa voie en Orient. La Russie n’est guère en mesure de le troubler. La France est engagée, plus peut-être