régulière les bastions défendent les courtines. De porte, il n’y en avait nulle part, mais dans un angle, un pieu mobile était enlevé le jour et replacé la nuit. Cette espèce de fortification sauvage était de l’avis de nos officiers disposée avec une intelligence remarquable. L’enceinte franchie, on se trouvait dans une sorte de labyrinthe : un sentier étroit, tortueux, resserré entre deux bordures de pieux. Les cases elles-mêmes étaient entourées d’une clôture ; pareilles à celles dont tous les voyageurs parlent avec mépris, elles n’avaient qu’une ouverture basse et le toit projeté en avant formait une sorte de hangar; une planche sert de porte, et cette planche est ordinairement sculptée. Les maisons des chefs, un peu plus spacieuses, ont au-dessus de l’entrée un frontispice, bas-relief retraçant des danses guerrières ou d’autres sujets ; souvent encore le pignon qui domine la porte est surmonté de la représentation colossale d’un personnage comme emblème de la puissance de l’homme qui habite la maison ; à ces demeures, fort sales, s’ajoutent quelques dépendances, où l’on prend les repas, où l’on garde les provisions. Les visiteurs jugent un tel village bien singulier, mais, comme résidence habituelle, ils le trouvent dépourvu de charme.
Dans cette région, les Néo-Zélandais passaient pour être convertis au christianisme, et les missionnaires proscrivaient avec fureur les sculptures ornant les maisons et les pirogues ; ils en ordonnaient la destruction. Les bons pasteurs évangéliques se croyaient pourtant moins barbares que les gens qu’ils prétendaient civiliser. « Dans un temps peu éloigné, disait le capitaine Du Petit-Thouars, il deviendra fort difficile de se procurer les moindres échantillons des arts et de l’industrie des Néo-Zélandais. »
On prendra intérêt et plaisir à suivre le commandant de la Vénus dans ses excursions aux lieux les plus renommés des environs de la baie des Iles. A la chute de la Waïtangi, on peut croire que tout est séduction ; le site dans l’ensemble, le mouvement rapide de la chute éclairée par des rayons du soleil perçant à travers de beaux arbres que la main de l’homme n’a point encore profanés, le bruit de la cascade, le bouillonnement des eaux sur les roches au pied de la chute, la vapeur qui monte semblable à une fumée diaphane, puis, au loin, le cours calme, silencieux de la rivière, forment un tableau que les visiteurs ne se lassent pas de contempler; c’est la Waïtangi, la Vallée des Larmes. A Waimata, sur l’immense plateau que les voyageurs ont atteint par un étroit sentier à peine reconnaissable entre les bruyères couvertes de fleurs d’une infinie variété, chacun se réjouit en parcourant des yeux l’horizon magnifique. On se désigne Tepuma, rendue célèbre par la première occupation des missions protestantes; les pointes qui limitent la grande baie, les îlots voisins du mouillage des vaisseaux du capitaine Marion et du