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Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 47.djvu/759

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lui-même. « Le bénéfice minime, dit-il, que doivent retirer les capitalistes sur les sommes qu’ils auront dépensées pour les travaux publics, ne représente pas un capital liquide gagné au détriment du pays, mais bien le 10 pour 100 au maximum de l’excédent de richesse apporté au pays par suite, d’une part, de la mise en rapport, grâce aux travaux exécutés, des ressources cachées dans le sol ou non exploitées à sa surface, et, d’autre part, de l’accroissement naturel de l’activité humaine et de la production agricole, industrielle et commerciale ; le 90 pour 100 de cet excédent restant dans le pays, c’est la population et l’état qui en bénéficient. En présence d’un pareil fait, aucune crainte ne doit plus subsister quant aux bénéfices fabuleux que les entrepreneurs pourraient réaliser au préjudice de la richesse nationale. » Quand il serait vrai, d’ailleurs. que ces bénéfices, sans être fabuleux, fussent cependant considérables, ne faudrait-il pas s’y résigner en présence de la nécessité pressante de donner du travail et des ressources à des populations qui meurent de faim ? a Faisons abstraction, dit Hassan-Fehmi, des pays qui, comme le nôtre, ont eu à subir tant de malheurs à la fois, et qui, encore aujourd’hui, luttent de toutes leurs forces pour s’en débarrasser ; mais dans les contrées les plus favorisées sous tous les rapports, lorsque la famine menace seulement une partie du territoire, ou lorsque la stagnation des affaires amène une perturbation dans les rapports économiques, l’état, dans un dessein humanitaire et politique, se fait un devoir de s’imposer des sacrifices énormes pour ordonner l’exécution de certains grands travaux non prévus, afin d’empêcher les populations de mourir de faim ou de céder aux suggestions de la misère pour troubler la paix publique ; c’est ainsi que les masses se trouvent occupées et leurs moyens de subsistance assurés par la prévoyance tutélaire de l’état. Voilà ce que nous voyons ailleurs ; tandis que chez nous, où l’exécution des travaux d’utilité publique est de la première urgence, il suffirait au gouvernement impérial de faire simplement un bon accueil aux entreprises de ce genre, sans grever le trésor d’aucune charge onéreuse, et de leur fournir avec empressement toutes les facilités possibles ; une abstention mal entendue à cet égard ne serait ni patriotique, ni rationnelle ; elle serait contraire aux principes les plus élémentaires de la science politique. » Un peu plus loin, Hassan-Pehmi revient sur le même raisonnement en termes plus pressans encore. « Nous nous trouvons, dit-il, en présence d’un dilemme inéluctable : ou laisser le pays dans l’état où la nature l’a placé et envisager dès aujourd’hui les conséquences fatales qui en résulteront, ou le faire participer aux bienfaits de la civilisation moderne. Il n’y a pas à reculer devant cette alternative ; sans aucun doute