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le calme parut régner d’une manière générale sur la Nouvelle-Zélande. On se croyait assuré de ne plus avoir beaucoup à craindre les Maoris, qui redoutaient les troupes régulières. Dans le désarroi, les chefs se lamentaient de ne pouvoir plus compter comme autrefois sur l’obéissance des hommes de leurs tribus. On estimait pourtant le nombre des soldats un peu faible s’il éclatait encore une insurrection.

Sir George Grey, obligé avant tout de pacifier le pays qu’il venait gouverner, ne négligea point les affaires civiles. Il avait acheté plusieurs districts de l’ile du Nord (et la partie méridionale de l’Ile du Sud, afin d’offrir des terres à la colonisation. Ayant conçu une idée avantageuse de l’intelligence des Maoris, ils les employait à la construction des routes et des maisons, à divers travaux dans les ateliers industriels ; il en fit même enrôler dans la police. Le commerce et l’agriculture, encouragés, prirent de grands développemens ; on vit s’accroître les revenus de la colonie; la confiance s’établit.

Sous la direction de l’église libre d’Ecosse, un nouveau groupe d’immigrans s’installait en 1847 à Otago, sur la côte orientale de l’île du Sud, à médiocre distance du détroit de Foveaux. Malgré l’origine particulière, on n’excluait personne; à chaque secte, il était permis de bâtir son église. Resserré entre la mer et une ligne de montagnes, Otago ne pouvait vivre que du port; de l’autre côté des collines s’est élevée la ville de Dunedin, dans une belle contrée où les terrains propres à l’agriculture sont considérables. Plusieurs rivières arrosent le pays, entre autres le Molyneux, le plus large cours d’eau de la Nouvelle-Zélande. Moins de trois ans plus tard arrivaient à la péninsule de Banks, dans le port de Lyttleton, dix-huit navires qui portaient trois mille émigrans. Ceux-ci formèrent l’établissement de Canterbury. Alors se trouvèrent envahis les principaux points du littoral. La population européenne de la Nouvelle-Zélande, qui, selon toute apparence, était au-dessous de deux mille au moment de la prise de possession, dépassait vingt-trois mille en 1850. Dix ans plus tard, elle approchera d’une centaine de mille[1]. Pendant la même période, la population aborigène décroît avec une désolante rapidité. En 1840, on comptait, sans distinction d’âge ou de sexe, cent dix mille à cent vingt mille Maoris. En 1850, les statistiques les mieux justifiées n’en donnent qu’environ soixante-dix mille. Quelques années encore, et ce chiffre sera tombé à cinquante et quelques mille[2]. Déjà on juge la race maorie presque éteinte sur l’île du Sud. Chez ce peuple, qui semble marcher si vite vers sa

  1. Le recensement de 1861 donne 98,961. Celui qui a été publié le 19 décembre 1867 indique les chiffres suivans : population civile, 215,068; militaire, 1,465.
  2. Le recensement publié le 19 décembre 1867 porte la population maorie à 38,540.