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Page:Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 49.djvu/634

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L’HÉRITAGE DE DARIUS

I.
LES CONQUÊTES LÉGITIMES ET LA GUERRE DE MONTAGNE DANS L’ANTIQUITÉ.


I.

J’appelle une conquête légitime celle qui a pour résultat de faire un sort meilleur au vaincu; c’est dans cet esprit que je me propose d’étudier les dernières campagnes d’Alexandre. Quand j’étais aspirant, j’avais pour compagnon sur la frégate l’Aurore un Egyptien nommé Mohammed, qui sortait, comme moi, de l’école navale de Brest; ce futur capitaine des vaisseaux du vice-roi n’était venu chez nous que pour s’y instruire des choses de la marine; en fait d’histoire, nous n’avions, selon son jugement, rien à lui apprendre : ses notions orientales lui suffisaient. Que de fois il nous a conté les exploits d’Alexandre Zoukarnès, de cet Alexandre devenu si cher aux vaincus, que les vaincus ont fini par s’enorgueillir plus encore que les Grecs eux-mêmes de ses victoires ! Consultez, comme l’a fait M. le baron Gobineau, ces récits orientaux épars dans toutes les légendes de la Perse et de l’Inde, vous apprécierez mieux à quel point fut profonde la trace laissée par le héros de la Macédoine dans la mémoire des populations iraniennes.

Si, au IVe siècle avant notre ère, la conquête de l’Asie eût été accomplie par un de ces capitaines d’aventure dont Cléarque fut le type et resta le modèle, la solution serait probablement demeurée des plus simples ; Eratosthène, le célèbre géographe d’Alexandrie, a pris soin de nous l’indiquer. On se fût souvenu que le genre humain