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diverses étaient représentées. Attirés par la perspective d’un travail assuré, des artistes s’y étaient fixés et y avaient leurs ateliers ; Phidias lui-même y résida pendant plusieurs années. Tant de richesses amassées en cet endroit devaient tenter la cupidité des vainqueurs de la Grèce. Les Romains cependant respectèrent pendant longtemps ces sanctuaires ; mais quand le siège de l’empire eut été transporté à Constantinople, les pillages destinés à embellir la nouvelle capitale commencèrent. Aux dévastations des hommes la nature ajouta bientôt son œuvre destructrice, et, vers le VIe siècle de notre ère, un tremblement de terre ayant achevé de renverser la plupart des monumens encore debout, les deux cours d’eau, l’Alphée surtout qui déborde souvent en hiver, ensevelirent sous une couche de vase tous les débris épars.

Malgré les difficultés que présentaient les explorations dans un terrain si profondément remué, on est parvenu en très peu de temps à reconstituer dans son ensemble la configuration ancienne d’Olympie, avec ses constructions de diverses époques enchevêtrées les unes dans les autres. Successivement les trésors de chaque ville, le Hiéræon de Philippe, la place publique, le stade où se faisaient les courses avec les compartimens, au nombre de vingt et un, où les concurrens alignés avant le départ devaient poser leurs pieds, puis des statues romaines, l’exèdre du rhéteur Hérode Atticus, les différens bassins où on faisait boire les chevaux ainsi que le bétail réservé pour les sacrifices, l’enceinte avec ses portes, et enfin les divers temples, celui de Héra et de Rhéa, furent déterminés dans leur vraie situation. Mais de tous ces monumens le temple de Jupiter était de beaucoup le plus important. Bâti par les Eléens avec le butin de guerre amassé par eux sur les Pisans, cet édifice avait été terminé dans son gros œuvre au plus tard 450 ans avant Jésus-Christ. C’était un temple périptère d’ordre dorique, orné de six colonnes sur chacune de ses façades et de treize sur ses grands côtés. Il avait été construit par un architecte éléen nommé Libon, et les artistes les plus fameux avaient concouru à sa décoration. On sait du reste qu’il renfermait le chef-d’œuvre de Phidias, une statue colossale de Jupiter, plus remarquable encore par la beauté du travail que par la richesse de la matière.

Au milieu d’un tel amas de décombres, quelques indications positives ont permis de se guider dans le travail de reconstitution des frontons de ce temple. Les cadres mêmes de ces deux frontons ayant été retrouvés, on avait ainsi d’une manière précise leurs dimensions et par conséquent une donnée d’une grande valeur pour rechercher la disposition des statues qui s’y trouvaient encastrées. On possédait d’autre part des renseignemens fournis par les auteurs anciens ; par Pausanias surtout, qui, ayant visité Olympie au IIe siècle de