Notre temps est une époque de transformation, de passage d’un ordre ancien, lent à mourir, à un ordre nouveau lent à s’affirmer. La lutte des idées nouvelles contre les idées anciennes dure depuis un siècle, et combien éloigné apparaît encore leur triomphe définitif ! Des institutions sociales, réalisation pratique de ces idées, les unes profondément ébranlées, sont désormais sans force ; les autres n’ont pas encore trouvé les puissantes assises dont elles ont besoin pour se développer dans la plénitude de leur action féconde. Le doute, l’incertitude, sont dans tous les esprits, même alors que la grandeur, la sécurité nationales sont en question. L’organisation de l’armée ne reste-t-elle point un problème dont, depuis dix ans, le pays attend avec anxiété la solution, toujours retardée ? On la dit prochaine, admettons-le ; mais la France, pour se retrouver dans sa force guerrière, doit autant que sur son armée pouvoir compter sur une marine militaire qui, même en temps de paix, fasse rayonner au loin son influence civilisatrice. Notre marine de guerre répond-elle à cette impérieuse nécessité ? La légende de 1870-1871, menteuse comme toutes les légendes, nous a longtemps bercés de ses illusions. En tant qu’institutions fondamentales du moins, notre marine semblait en effet échapper à cette loi générale de rénovation qui nous entraîne. Était-ce bien vrai ? La question vient d’être posée avec un grand retentissement dans le monde maritime par le court passage au pouvoir d’un homme à l’esprit ardent et convaincu qui