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trois cinquièmes, et pour les deux cinquièmes qui restent, il indique des ressources claires, certaines, qui évitent au trésor toute charge d’intérêt et au marché la secousse d’un emprunt public. Le ministre actuel des finances commence par enlever 53 millions au budget extraordinaire pour les reporter au budget ordinaire. Cette réforme était depuis longtemps demandée par tous les esprits perspicaces qui ont le goût de la correction financière. On avait pris l’habitude de dégager le budget ordinaire d’une foule de dépenses qui sont régulières, qui se représentent chaque année, et on les dotait abusivement avec des fonds d’emprunt. C’était un procédé commode qui faisait apparaître nos budgets ordinaires en excédent quand en réalité ils étaient en déficit. Nous avons constaté, par exemple, que le budget de 1881 se soldait, si on examinait les choses de près, par un déficit de 12 millions de francs, nous eussions dû dire par un déficit de 50 à 60 millions, car on avait bien enlevé an budget ordinaire de 1881 une quarantaine ou une cinquantaine de millions de dépenses qu’on avait à tort inscrits au budget extraordinaire du même exercice. Qui oserait prétendre que les dépenses concernant l’établissement de lignes télégraphiques, le matériel naval, le service hydraulique en Algérie, les lacunes et les grosses réparations des routes nationales ne soient pas des dépenses permanentes auxquelles il convient de pourvoir avec les seules ressources permanentes et normales, à savoir l’impôt? Nous sommes même disposé à croire que M. Léon Say ne va pas assez loin et qu’il reste encore à son budget extraordinaire des crédits qui devraient figurer au budget ordinaire. Ainsi toute une partie des frais de personnel de l’administration centrale du ministère des travaux publics, les traitemens d’un grand nombre d’ingénieurs et de sous-ingénieurs des ponts et chaussées, l’insuffisance éventuelle des produits des chemins de fer exécutés par l’état, toutes ces dépenses, qu’il suffit d’énumérer pour voir qu’elles sont permanentes, figurent encore au budget extraordinaire : c’est un abus. Non-seulement l’état emprunterait pour construire des voies ferrées, mais il emprunterait encore pour payer les frais d’exploitation des chemins de fer construits. Au lieu de se contenter de reporter 53 millions du budget extraordinaire au budget ordinaire, M. Léon Say eût pu et peut-être dû élever à 60 ou 70 millions le chiffre de ce transfert.

Le budget extraordinaire de 1883, après ces déductions, montait encore à près de 570 millions de francs. M. Léon Say en retranche 190 millions de dépenses, auxquels il sera pourvu avec les crédits non employés des exercices antérieurs, puis 81 millions qui seront dotés avec les annulations de certains crédits afférens à des exercices écoulés. Il n’y a aucune objection à faire à ces combinaisons.