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L’opinion de Phillimore, d’après lequel (International law, p. 233) « il est de maxime reçue en droit international que le gouvernement d’un état peut interdire l’entrée des étrangers dans le pays et, par suite, régler les conditions sous lesquelles il leur sera permis d’y résider ou les contraindre à partir, » n’a pas prévalu contre cette ancienne tradition. L’Angleterre a pu, pour diverses raisons, désarmer à ce point son gouvernement sans compromettre sa sécurité. D’abord elle est séparée par la mer des autres états européens et les gens sans aveu peuvent moins aisément franchir cette frontière. Ensuite elle oppose à toutes les tentatives qui pourraient être dirigées contre son repos et sa sûreté l’inébranlable rempart de sa constitution et de ses mœurs politiques. Elle peut être hospitalière et tolérer qu’on abuse de son hospitalité.

Mais c’est là un régime exceptionnel que ne supporteraient pas, du moins sans de graves inconvéniens, les peuples du continent. Beaucoup de malfaiteurs, s’il faut en croire des publicistes sérieux[1], se donnent rendez-vous en Grèce, parce que le gouvernement, outre qu’il répugne à la négociation des traités d’extradition, n’est pas investi du droit d’expulser les étrangers. Lorsque la loi du 22 septembre 1835, qui confère au gouvernement belge le droit d’expulsion, cessa pendant quelque temps d’être applicable, faute d’avoir été renouvelée en temps utile (1er mars 1864), la Belgique s’en trouva fort mal. Le ministère dut, à cette époque, informer la chambre des représentans « que l’absence momentanée d’une loi dont l’effet comminatoire seul avait toujours été salutaire avait appelé en Belgique un grand nombre de malfaiteurs de tous les pays et permis à certains étrangers de poser (sic) des faits de nature à compromettre la sécurité du pays. » C’est à la suite de ces explications que fut votée la loi du 7 juillet 1865.

D’après la loi belge du 1er juillet 1880, l’étranger résidant en Belgique, qui, par sa conduite, compromet la tranquillité publique, ou celui qui est poursuivi ou qui a été condamné à l’étranger pour des crimes ou délits qui donnent lieu à l’extradition, peut être contraint par le gouvernement de s’éloigner d’un certain lieu, d’habiter dans un lieu déterminé ou même de sortir du royaume. L’arrêté royal, enjoignant à un étranger de sortir du royaume « parce qu’il compromet la tranquillité publique, » doit être délibéré en conseil des ministres. Ces dispositions ne sont pas applicables aux étrangers qui se trouvent dans un des cas suivans, pourvu que la nation à laquelle ils appartiennent soit en paix avec la Belgique : 1° à l’étranger autorisé à établir un domicile dans le royaume ; 2° à l’étranger marié avec une femme belge dont il a un ou plusieurs enfans nés

  1. V. Pasq. Fiore, Droit pénal international, I, p. 117.