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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars.

Dire dans quel ordre d’institutions vit présentement la France sous le nom de la république et quel caractère prendront définitivement ces institutions, ce serait assez difficile. On parle souvent par habitude du régime constitutionnel et parlementaire, de la majorité qui décide et règne dans ce régime, et le fait est que de tout cela il n’existe guère que des apparences, une fiction, une représentation extérieure et artificielle.

Ce qu’il y a réellement aujourd’hui, ce qui tend de plus en plus à s’établir dans les mœurs nouvelles qu’on nous fait, c’est un système d’une nature particulière et imprévue. La constitution, oui, sans doute, elle reste la loi publique; elle existe, — sans l’esprit de pondération qui est l’essence et la force du vrai système constitutionnel, — et on ne refuse pas de la laisser vivre à la condition de l’interpréter, de la plier à tout ce qu’on veut, ou de la menacer de toutes sortes de révisions salutaires qu’on tient en réserve. Le régime parlementaire, lui aussi, est censé exister avec les deux assemblées qui en sont les ressorts, sénat et chambre des députés; il existe à la condition que l’une des deux assemblées se borne à enregistrer ce que l’autre a décidé et que le sénat ne se hasarde pas même à glisser un modeste amendement dans une loi que la chambre des députés aura votée. Si le sénat « cette hardiesse il devient dangereux, — ce n’est plus le régime parlementaire tel qu’on l’entend. Et la majorité qui est censée régler le mouvement de cet ingénieux mécanisme, quelle est-elle? où est-elle? elle a été un instant, il y a quelques mois, avec M. Gambetta, cela n’est pas douteux, elle est maintenant contre lui, c’est encore plus certain; elle est même plutôt contre M. Gambetta, dont elle poursuit la défaite