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appeler le Haut-Languedoc, groupe tout aussi naturel que le groupe-normand » Or, dans le haut Languedoc comme en Normandie, l’infécondité va en s’aggravant chaque jour, puisqu’en 1878, dans ces trois départemens, il y a eu excédent des décès sur les naissances. Là aussi il semble que l’infécondité, comme un mal contagieux, se propage dans les départemens limitrophes, car en 1878 on a pu constater un excédent des décès dans la Haute-Garonne et la Gironde, départemens qui n’appartiennent pas au Haut-Languedoc, mais qui en sont voisins.

Ce qui montre bien que ces chiffres statistiques répondent à des phénomènes constans, réels et réguliers dans toutes leurs manifestations, justiciables, par conséquent, d’une appréciation rigoureusement scientifique, c’est que les départemens qui ont eu, de 1826 à 1876, une natalité inférieure à la mortalité sont encore ceux qui, chaque année, perdent le plus d’habitans par l’excédent des décès. Malheureusement tout n’est pas dit quand on a parlé de la Normandie, du Haut-Languedoc et du Var. Plusieurs départemens, qui, autrefois, avaient un excédent des naissances, présentent maintenant un excédent des décès. L’infécondité de la France, si notable déjà dans les premières années de ce siècle, s’est accrue énormément. En 1878, quatorze départemens, qui n’appartiennent ni au groupe normand ni au groupe languedocien, ont présenté un excédent des décès. En Champagne, en Provence, en Bourgogne, les naissances diminuent progressivement, et il y a une tendance marquée à ce que les décès, comme dans la Normandie et le Languedoc, dépassent de plus en plus le nombre des naissances.

Et les chiffres ainsi obtenus ne sont pas accidentels, car, depuis cinq ans, ce sont encore les mêmes départemens qui ont donné un excédent des décès. Nous ne parlons pas des départemens de la Normandie ou du Languedoc. Ceux-là perdent chaque année depuis un demi-siècle, et l’excédent des décès, toujours considérable, augmente régulièrement. C’est un phénomène social, aussi constant, aussi assuré que les faits les plus rigoureux de la physique et de la chimie.

Nous verrons plus tard ce qu’il faut penser de la cause de cette infécondité. Il nous suffira de constater ces trois faits : que la natalité de la France a été en décroissant depuis le commencement de ce siècle pour la France tout entière comme pour chaque département sans exception ; que l’excédent des décès sur les naissances est marqué surtout dans la Normandie et dans le Haut-Languedoc ; que d’autres départemens de la Provence, de la Champagne, de la Bourgogne, lesquels, il y a cinquante ans, fournissaient un excédent des naissances, fournissent maintenant un excédent des décès.