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Votre mot d’ordre à vous, si le roi disparaît dans une tempête ou, pour mieux m’exprimer, quand il disparaîtra, c’est la Franche-Comté d’abord et, au besoin, Besançon. Que vous faut-il ? Vous avez des fortifications, des murailles, une population intelligente et vigoureuse, un organe national si votre journal s’exécute. Vos ressources sont dans. vos mains. Je vous jure qu’au-delà il n’y a rien.


Provinciaux ! provinciaux ! prenez garde à vous !


Voici ce qu’il faut faire, pour moi-même quand tu ne verrais pas les choses comme moi, ce qui est à peu près certain. Il faut voir tes journalistes, même quand tu ne les connaîtrais pas ; il faut leur dire que je suis des leurs, que j’en suis très ostensiblement s’ils veulent mon nom et qu’il vaille la peine d’être voulu ; que ma position sur le gouffre ne m’empêchera pas de crier au dehors ce qui se passe dedans ; qu’un moribond est heureux de pouvoir choisir son genre de mort, et que j’aurais plus de joie à mourir pour mon pays qu’à entrer pour la première fois dans le lit de la plus jolie des maîtresses que j’avais à vingt ans, avec mes vingt ans et mon amour. Je crois que c’était Pauline.

Attends. Il faut leur dire que je suis très pauvre, que je vis de mon encre et de mon papier, et que s’ils peuvent me les payer ils feront bien ; mais il faut ajouter que s’ils ne peuvent pas, comme je m’en doute, je mendierai pour avoir le temps d’écrire, et je paierai pour faire imprimer.

S’ils s’informent de ma profession de foi, tu leur diras qu’elle est très simple, et que je la professe depuis l’enfance. Tu leur diras qu’en ma qualité de Français conquis, j’ai servi la restauration, tant que j’ai vu en elle une double garantie contre deux exécrables esclavages, celui de la démocratie parisienne, et celui de l’empire, mais que la centralisation m’en a détaché. Tu leur diras qu’en ma qualité de Franc-Comtois, je ne veux point de vos ravageurs qui ne nous ont pas laissé nos libertés, comme le dit le prospectus, qui les ont au contraire insolemment violées. Tu leur diras que je ne veux point des principions d’Allemagne (ils demandent aujourd’hui un Leuchtenberg) parce que ce. changement de dynastie ne serait qu’une invasion hypocrite. Tu leur diras que je ne veux point de la république de Paris, parce que je saisi ce qu’elle sera. Tu leur diras que mon dévoûment est pour la Franche-Comté et pour Besançon, et qu’il sera tout à fait exclusif, quand, ce qui est encore : aujourd’hui ne sera plus.


Nodier se souvenant qu’il est Français conquis près de deux siècles après l’annexion de la Franche-Comté, voilà qui vous étonne,