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trop son pays pour ne pas rougir de son ingratitude envers celui qui aurait dû être maintenu aux affaires, autant par la reconnaissance publique qu’afin d’éviter les secousses aiguës et stériles qu’il était permis de prévoir.


II

Pour l’extrême droite, le pouvoir du maréchal n’était qu’un mandat provisoire auquel un événement prochain allait mettre un terme. M. Dufaure aurait voulu que cet aveu de projets secrets fût fait à la tribune. Le 2 juillet, il demanda vainement la mise à l’ordre du jour des bureaux des projets de lois constitutionnelles qu’il avait déposés au nom du gouvernement de M. Thiers. Après l’automne agité de 1873, lorsque le refus venu de Frohsdorf eut fait avorter l’entreprise, M. Dufaure reprit avec la même obstination sa demande. À la proposition de créer le septennat, il réclamait, le 5 novembre, qu’on joignît les lois constitutionnelles pour en saisir la même commission. L’assemblée n’admit pas la jonction, mais elle décida, peu après, la formation d’une nouvelle commission des trente à laquelle seraient renvoyés, après une année d’attente, toutes les lois. Des cinq membres de gauche admis dans la commission, M. Dufaure fut le premier. Nous ne pouvons le suivre dans ces interminables débats, que la majorité ne se lassait pas de retarder par l’espérance toujours poursuivie de quelque solution chimérique.

Il luttait depuis sept mois dans le sein de cette commission, lorsque M. Casimir Perier déposa une proposition tendant à l’organisation de la république. Sa conviction était trop ancienne pour laisser à d’autres le soin de répondre à M. de Broglie. Ce qu’il redoutait par-dessus tout, c’étaient « les époques où les nations fatiguées des longues luttes engagées dans leur sein cherchent un homme auquel elles s’adressent, devant lequel elles s’inclinent, à l’autorité duquel elles veulent se rendre. Messieurs, cela est trop vrai, il y a trop de personnes qui poussent les nations à ces idées d’abaissement et d’abdication. Mais nous avons à voir les choses de plus haut, et si ce que l’on disait était vrai pour nous en ce moment, s’il y avait en effet une tendance A dédaigner ces luttes parlementaires qui ont fait autrefois l’honneur de notre pays et à se rejeter vers la tutelle du pouvoir d’un seul homme, ce serait une raison de plus pour que nous fissions comprendre à tout le monde que la force d’une nation réside dans les principes dont elle vit plus que dans les hommes qui la gouvernent. « Il rappela qu’on avait vu, du 24 mai au 20 novembre, des comités occultes se substituer au gouvernement et suppliait l’assemblée de faire l’acte le plus