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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 juillet.

Il n’y a point de dettes qui ne se paient, c’est un dicton vieux comme le monde avec lequel on a fait des comédies, même des tragédies, et les plus lourdes dettes ne sont pas toujours des affaires d’argent. Il y a aussi ces dettes qui en politique s’appellent les engagemens présomptueux, les coûteuses poursuites de popularité, les complicités onéreuses, les mécomptes préparés par les faux calculs. Cela veut dire qu’en politique toutes les fautes sont des dettes et qu’un jour ou l’autre elles se paient. Quand, par imprévoyance ou par témérité, par irrésolution ou par inexpérience, on s’est jeté ou on s’est laissé entraîner dans d’inextricables embarras extérieurs, les conséquences se font bientôt sentir et deviennent inexorables : on ne peut plus les éluder, il faut payer ! Quand, par aveuglement d’esprit ou par des condescendances intéressées, on a laissé les partis abuser de leur pouvoir, mettre en doute les institutions et les lois, troubler les mœurs et les croyances, on ne tarde pas à tomber dans une confusion d’où l’on ne sait plus comment sortir : il faut encore payer pour ce qu’on a fait et pour ce qu’on a laissé faire. Lorsque, par des dépenses démesurées, ou par des combinaisons chimériques, on a gravement engagé, sinon compromis, les finances publiques, il n’y a pas à dire, il faut s’arrêter, voir de plus près au budget et régler ses comptes ! Tout ce qui se passe depuis quelque temps, ces incidens, ces discussions qui se sont succédé à propos des affaires égyptiennes, de la politique intérieure, des difficultés financières, et cette crise ministérielle qui vient aujourd’hui compléter l’imbroglio, tout cela, qu’est-ce autre chose qu’une série de dettes représentant l’imprévoyance de plusieurs mois, de plusieurs années, et arrivant ensemble à la fatale échéance ? Il faut payer, c’est le dernier mot, — avec cette particularité aggravante et peu consolante que ce sont toujours les partis, les ministères, les