obstacles de la part des propriétaires, qui sont souvent fort empêchés de résister, la location héréditairement. Dans un passé assez récent encore et dont les erremens ne sont pas entièrement oubliés, lorsque le propriétaire, usant de son droit, voulait substituer un nouveau fermier à l’ancien, il s’exposait à de terribles représailles ; elles se montrèrent telles encore, il y a peu d’années, dans le Santerre, qui forme une partie de ce même arrondissement de Péronne. Si l’on consulte les procès et les plaidoiries qui ont eu lieu à Amiens et dans d’autres villes de la Picardie et du Nord, sans parler ici des ouvrages de jurisprudence où les points de droit sont examinés et débattus, on voit que non-seulement le fermier s’arroge la latitude de rétrocéder à un autre son droit de marché moyennant une somme d’argent variant entre 800 et 1,500 francs par location, mais qu’il s’attribue le droit exclusif d’acheter les terres qu’il tient à ferme lorsqu’elles sont à vendre. L’étonnement qu’inspirent ces bizarres et oppressives coutumes augmente encore, lorsqu’on voit, dans certaines localités, les pareils les plus proches revendiquer comme un privilège propre à leur qualité la possibilité d’acquérir les biens dits de famille, ou biens échus dans une succession à une personne désireuse de les aliéner. Ajoutons qu’une sorte de droit d’aînesse est appliquée par la classe des fermiers dans les régions où cette coutume subsiste. L’enfant qui prend la ferme, qu’il soit l’aîné ou non, le devient pour ainsi dire ; il jouit des privilèges de l’aînesse en ce sens qu’il est toujours avantagé. S’il a des sœurs, leur part est frappée d’un droit de marché au profit de leur frère. Cette coutume, qui ne laisse pas d’être assez compliquée, on le voit, et qui l’est au point de mettre plus d’une fois dans l’embarras les tribunaux, malgré leur désir d’en finir avec elle, est mise sous la garantie de violences dont l’impunité est presque toujours assurée par la solidarité des intéresses et la complicité des paysans qui prennent parti pour les fermiers. On met plus rarement qu’autrefois le feu aux bâtimens du propriétaire frappé du mauvais gré ; l’assassinat ne le menace plus si souvent : mais on fait tout le mal possible à ses champs, à ses récoltes, à ses troupeaux. Bien que resserré dans des limites étroites, c’est-à-dire entre une partie de l’arrondissement de Péronne, quelques cantons du Pas-de-Calais et du département du Nord, un tel abus, survivant en France, est une des plus curieuses et des plus tristes preuves de la persistance des coutumes barbares. Je prie qu’on remarque que tels des procès auxquels j’ai fait allusion ne datent que d’hier pour ainsi dire. En 1860, dix procès pour incendies ne pouvant être attribués qu’à la vengeance furent jugés par les assises du département du Nord. Il y eut des granges et des récoltes livrées aux flammes en présence de paysans prenant hautement parti pour le fermier. J’ai dit que l’assassinat n’était plus guère usité ;
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