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rèrent ne pouvoir prendre part à la discussion que sous la condition expresse de, sauvegarder, avec l’établissement de nouvelles taxes, le caractère fedératif de l’Empire, et de conserver dans leur intégrité les droits du parlement pour le vote du budget. Le comte Fugger, président de la commission et membre de la fraction du centre, dénonça l’adoption du monopole comme le plus rude coup qui pût être porté aux bases fédératives sur lesquelles repose l’Empire: die stärkste Erschütterung der foderativen Grundlagen auf welchen das Reich beruld. Jugement confirmé depuis par M. Windhorst, quand il répète que l’adoption du monopole équivaudrait pour les états particuliers à une abdication, non sans avouer que, dans la voie de cette abdication, lesdits états ont déjà fait bien des pas compromettans. En effet, quelle influence exercent encore au Bundesrath les gouvernemens des états secondaires ? Les états particuliers n’ont-ils pas donné la preuve de leur effacement et de l’abandon de leurs droits souverains en adhérant au projet de monopole du tabac, quand les mandataires élus de leurs populations combattent ce projet pour en éviter les conséquences politiques? Depuis l’adoption de la constitution de l’Empire au profit de la monarchie prussienne, les autres trônes existant encore en Allemagne ne subsistent plus, à vrai dire, qu’à titre de monumens historiques, conservés comme souvenir des temps qui ne sont plus, en possession de princes médiatisés ou à peu près médiatisés, en attendant qu’un décret impérial ordonne de les déposer à Nuremberg au musée des antiquités nationales. Quant aux dispositions de la fraction du centre, ce groupe compact, que toutes les entreprises et les manœuvres du chancelier n’ont pu entamer, qui sort de chaque nouvelle épreuve électorale agrandi et renforcé, la presse officieuse et libérale insinue souvent l’intervention d’un marché par lequel la fraction voterait en faveur des projets du gouvernement, moyennant le retrait des lois d’exception édictées contre l’église catholique sous le régime du Culturkampf. Sans doute, c’est avec le concours de la fraction du centre unie aux groupes conservateurs, que la revision du tarif douanier dans le sens protectionniste, première partie du programme financier à l’ordre du jour au Reichstag, a pu être menée à bonne fin. Néanmoins, malgré les tentatives du prince de Bismarck, il n’y a pas eu, et il n’y aura jamais, entre les hommes du centre et le gouvernement, de marché dans le sens propre du mot. Ceux-là se trompent qui croient à une influence de la curie romaine pour déterminer les catholiques allemands à voter de nouveaux impôts, contre la promesse de concessions sur le terrain de la politique ecclésiastique. Même l’eventualité d’une restauration du pouvoir temporel du pape, touchée récemment par certains organes oflicieux à Berlin, ne produirait pas, sous ce rapport, d’effet décisif. Ces sortes