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de ballons d’essai laissent froids les chefs du centre, qui veulent tout attendre de leur bon droit et de la logique des événemens. Souscrire un marché quelconque avec le chancelier, ce serait d’ailleurs s’exposer à être dupes. Mais, à part ces réserves, les affinités des catholiques rendent possible une entente avec les conservateurs, pour assurer au gouvernement la majorité dont il a besoin, quand les différends ecclésiastiques seront une fois réglés. Rappelons-nous que, si lors de la demande du crédit pour la création d’un conseil économique de l’Empire, à instituer spécialement en vue des réformes en cours, M. Windhorst a déclaré qu’il n’est « pas encore prêt à voter pour cette proposition, » le leader du centre a décidé sa fraction à oter les fonds secrets refusés au budget de l’exercice précédent, mais accordés à la veille du vote des conservateurs, aux chambres prussiennes en faveur de la loi qui autorise le retour dans leurs diocèses des évèques exilés et le rétablissement des curés dans les paroisses privées de prêtres. Et afin de faire entrevoir au gouvernement impérial combien les volontés humaines sont mobiles et susceptibles de changer, le plus diplomate des parlementaires allemands laisse échapper cet aveu plein de réticences : Hominis voluntas ambulatrix usque ad mortem.

Les partis libéraux, ardens promoteurs de l’état unitaire, que nous avons vus combattre encore récemment le système des contributions matriculaires, réclamé par les particularistes comme une garantie du principe fédératif, les partis libéraux protestent contre toute modification de la constitution. Ils s’élèvent avec force contre les tendances réactionnaires que le rescrit du 4 janvier 1882 a mises à jour et que les attaques du chancefier de l’Empire contre le Reichstag accentuent davantage. Publié dans l’intention visible de rassurer contre toute éventualité les fonctionnaires qui se laissent aller à des excès de zèle pour les candidatures officielles, en cas de nouvelles élections, ce rescrit met à couvert la responsabilité des ministres derrière l’autorité du souverain, cherchant à diminuer ainsi la considération due à la représentation du peuple. On comprend l’émotion de tous les esprits libéraux devant la menace d’un conflit constitutionnel et d’un coup d’état possible. Les orateurs progressistes n’ont pas hésité à déclarer que la monarchie sera en danger le jour où elle s’avisera de gouverner sans la participation des représentans élus de la nation. M. de Bennigsen, parlant au nom du groupe national-libéral, à l’occasion des débats sur l’introduction du monopole, prémunit le gouvernement de l’Empire contre toute velléité d’écarter le parlement ; il recommande comme une nécessité pour le développement pacifique de l’Allemagne le maintien de la consiitulion dans sa tonne actuelle, où, conformément aux exigences de la situation, l’idée unitaire se trouve unie au principe fédératif.