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région qui avoisine la côte est pacifique et inoffensive. Le secrétaire-général du gouvernement, M. Martin, s’exprime ainsi dans son rapport de 1881 : « Loin d’être en augmentation, les attentats dirigés contre les Européens ont été plus rares, car il ne faut pas oublier, dans la comparaison des chiffres, de tenir compte de l’agrandissement du territoire civil, » Que l’on renonce aux rigueurs superflues, à la responsabilité collective des tribus dans le Tell, au séquestre de leurs biens, aux peines de confiscation qui exigent des indigènes présumés délinquans le cinquième ou même la moitié de leurs biens. Puisque la république a, dans la France continentale, une si grande confiance dans l’instruction, qu’elle s’occupe de l’œuvre, jusqu’ici déplorablement délaissée, de l’éducation des Arabes. Croirait-on que le budget de l’Algérie, sur un chiffre de dépenses de 31 millions, n’affecte pas 100,000 francs à l’instruction chez les indigènes? Il y avait autrefois un collège arabe français, on l’a supprimé. On ne comptait. en 1880, dans toute l’étendue du territoire civil, que vingt-deux écoles arabes françaises, au lieu de plusieurs centaines qu’il eût finnois. Aussi se produirait-il parfois des incidens qui jettent le ridicule sur notre colonisation : on a institué une prime aux cadis qui connaîtraient la langue française; or, depuis un grand nombre d’années, trois cadis seulement ont réussi à passer heureusement l’examen qui pouvait leur valoir cette récompense. Soyons conséquens ; puisque nous répétons à tout propos, de manière à en fatiguer les oreilles, que l’instruction moralise, pacifie, instruisons les Arabes.

Il est un problème plus compliqué, dont on doit, aujourd’hui que l’Algérie est vieille de plus de cinquante ans, aborder résolument la solution ou les solutions. Ce problème, c’est la représentation des indigènes dans les assemblées locales et même, nous n’hésitons pas à l’écrire, dans notre parlement national. Les Kabyles ont leurs djemmaas ou conseils électifs. Les tribus sont administrées, conformément à leurs traditions et à leurs usages, par leurs chefs, sous La surveillance de l’autorité, française. Dans les communes de plein exercice du territoire civil, les indigènes nomment une certaine fraction du conseil municipal. L’autorité administrative choisit des assesseurs musulmans qui siègent dans les conseils-généraux et au sein du conseil supérieur de gouvernement. La question de ces assesseurs a souvent été l’objet de controverses. Beaucoup d’Algériens voulaient qu’on les supprimât. Un conseil-général mieux inspiré a demandé qu’au lieu d’être choisis par l’autorité, ils fussent élus par leurs coreligionnaires; cette solution est la bonne. Nous la trouvons cependant insuffisante. Sans nous arrêter à l’examen de la représentation locale, nous allons brièvement exposer les raisons qui doivent déterminer à octroyer à certaines catégories d’indigènes