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Page:Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 54.djvu/167

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pour résultat qu’en 1885, sur 7,100,000 livres sterling d’annuities, 6 millions seront à expiration. On aura donc de ce chef une économie annuelle de 150 millions de francs. Que faire de cette somme ? Nous savons bien ce qu’on en ferait chez nous avec le laisser-aller de nos ministres. On parlerait tout de suite de dégrèvemens ou de dépenses extraordinaires. En Angleterre, on propose d’en faire la base d’une nouvelle réduction de la dette sur une échelle plus considérable encore, et on n’attend même pas l’échéance de 1885. Dans la crainte qu’il prenne fantaisie à un nouveau ministre d’en disposer autrement, on voudrait engager dès à présent 2 millions de livres sterling, sur les 6 qui seront disponibles en 1885, à amortir un nouveau capital de 60 millions de livres ou 1 milliard 1/2 de francs en 25 ans. Et quant aux 4 autres millions de livres, on leur donnera probablement plus tard la même affectation. De sorte que, sans augmenter l’intérêt de la dette et, par le seul fait de le maintenir au même chiffre pendant un quart de siècle encore, l’Angleterre verrait au bout de ce temps cette dette considérablement réduite. Que l’on compare cette conduite avec la nôtre.

La dette, en France, s’accroît sans cesse ; nous empruntons beaucoup plus que nous n’amortissons. On nous a dit qu’on avait depuis la guerre amorti 1,500 millions, soit ; mais comme on a emprunté 2 milliards 1/2 sous toutes les formes, la balance est encore au passif un accroissement de 1 milliard. Et voyez combien notre manière d’agir est différente de celle des Anglais ! Ceux-ci ne craignent pas de charger le présent pour dégrever l’avenir ; en ce moment même, ils ajoutent 1 penny 1/2 à leur income-tax pour payer les frais de l’expédition d’Egypte. Quant à nous, nous escomptons les ressources de l’avenir au profit du présent pour continuer les dépenses extraordinaires. C’est ainsi que M. Léon Say se fait rembourser d’avance une partie de ce qui nous sera dû par les chemins de fer. Et ce n’est qu’à cette condition qu’on parvient à mettre péniblement le budget en équilibre. On s’étonne que notre 3 pour 100 reste à 82 et 83 francs et que la rente amortissable soit au-dessous du cours où elle a été émise, lorsque les consolidés anglais touchent le pair et que les Américains sont tout près d’emprunter à 3 pour 100. Il y a là, en effet, une comparaison qui appelle l’attention. Sans doute, nous sommes plus qu’aucun autre peuple exposés à la guerre et aux révolutions, et cela explique pourquoi notre crédit n’a pas tout l’essor qu’il devrait avoir eu égard à notre richesse ; mais on peut être sûr pourtant que, s’il y a un écart aussi considérable que celui que nous venons de signaler entre notre crédit et celui des Anglais et des Américains, cela tient à ce que nos finances sont trop engagées. On a le sentiment qu’au jour d’une crise nous