de trois jours oblige l’Allemagne à avoir deux arsenaux. Celui de la Baltique est trop éloigné pour protéger à temps contre une attaque française ou anglaise les embouchures de l’Ems, de l’Elbe ou du Weser. Celui de la mer du Nord est trop éloigné pour défendre les côtes de la Poméranie et de la Prusse contre les insultes de la Russie. Même continues, les côtes d’un pays doivent être couvertes par plusieurs arsenaux, si le long développement de ces côtes et leur disposition les exposent sur plusieurs points aux entreprises de plusieurs puissances. L’Italie par exemple n’est pas en sûreté si elle n’est protégée par deux centres de force maritime, l’un à l’est, l’autre à l’ouest, contre des tentatives dirigées de Pola et de Toulon.
De la diversité de ces conditions se dégage l’unité de la règle. Un port n’est pas propre à la défensive, si ses vaisseaux ne peuvent être présens avant les vaisseaux ennemis sur tout le littoral dont il a la garde : il doit donc y avoir moins de distance entre lui et tous les points de la frontière qu’entre ces points et aucun arsenal étranger. Un port n’est pas propre à l’offensive si ses vaisseaux ne peuvent paraître sur le rivage ennemi aussitôt que les forces adverses : quand la négligence des nations voisines souffre une pareille supériorité, il doit s’établir plus près de leur frontière que les ports étrangers ne sont de la sienne, mais du moins n’est-il pas admissible qu’il s’établisse plus loin.
Quels ports réunissent ces deux avantages ? Ceux qui s’élèvent à proximité des côtes étrangères. Alors les flottes couvrent comme une avant-garde le littoral qu’on ne saurait menacer sans les rencontrer d’abord, elles arrêtent à son début l’effort de l’agression, et il leur devient facile de la prévenir en portant elle-même la guerre chez l’ennemi. L’avantage d’une semblable situation est tel que, même au temps de la marine à voiles, on considérait comme capital de l’obtenir. C’est menacé par les flottes de l’Angleterre et de la Hollande que Louis XIV fit un port de guerre à Dunkerque, sur le point de la France le plus rapproché de ses deux adversaires, et la ténacité du roi à le maintenir, comme l’obstination de l’Angleterre à le supprimer, sont un exemple de l’importance qu’a dans la guerre maritime le choix des arsenaux.
Chercher sur son littoral de telles positions est le premier intérêt d’un peuple ; le second, quand il les a trouvées, est de n’en pas chercher d’autres. Ajouter à ces sièges nécessaires de la puissance navale des arsenaux moins bien situés et diviser entre eux la flotte, c’est éloigner des navires du théâtre probable de leur action, c’est frapper sa propre force d’une infériorité relative. La flotte arme alors par fractions qu’il faut assembler avant de s’en servir, et la concentration a pour théâtre la rade la mieux située. Les navires armés là et prêts les premiers sont contraints d’attendre que les