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revient. Il ne faut pas se tromper d’un centime : chaque centime payé par mètre cube à la compagnie du gaz représente une somme annuelle de 2 millions 1/2.

Un pareil compte est difficile à établir. Les bénéfices d’une industrie peuvent augmenter pour trois causes : progrès et inventions, baisse de prix de la main-d’œuvre ou de la matière première, augmentation du chiffre d’affaires. La première cause est scientifique, les deux autres sont commerciales. La première seule est visée par le traité de Paris. Il n’en est pas de même à Londres. Le parlement a passé des traités avec diverses compagnies qui se sont partagé les quartiers de la ville et jouissent d’un vrai monopole, parce qu’il ne peut pas en être autrement, sans que le mot de monopole ait été prononcé. Nous avons, m’ont dit les ingénieurs, a practical monopoly. La Gas light and coke Company est de beaucoup la plus importante : elle fabrique à elle seule un tiers plus que la Compagnie parisienne. Le rapporteur du conseil municipal de Paris a pu visiter ses magnifiques usines, voir tous ses comptes et garder un exemplaire de ses traités, grâce à la très courtoise obligeance de MM. les administrateurs et ingénieurs. Les traités de Londres déterminent une limite aux bénéfices des actionnaires, et en principe ce bénéfice était fixé à 10 pour 100 du capital. Ainsi toutes les causes, commerciales ou scientifiques, d’accroissement des bénéfices profiteront au consommateur. Vers 1873, lorsqu’on commença à tirer parti des sous-produits, la compagnie fit observer au parlement que l’espoir de gagner davantage la pousserait à faire des essais et des recherches dont le public profiterait. Le parlement le comprit. Aujourd’hui toutes les fois que la compagnie diminue d’un penny le prix des 1,000 pieds cubes, elle a le droit de donner 1/4 pour 100 de plus à ses actionnaires[1]. C’est le principe du partage des bénéfices entre le fabricant et le consommateur.

Si ce principe était écrit dans notre traité, le rôle de M. le préfet de la Seine serait bien facile. Il n’est pas douteux que les bénéfices de la Compagnie parisienne aient énormément augmenté ; il est certain qu’aujourd’hui son prix de revient ne dépasse pas 7 centimes par mètre cube, 15 centimes en y joignant toutes les charges municipales, même la part des bénéfices de la ville. Il est prouvé que ce prix de revient, sans les charges, bien entendu, ne dépasse pas celui de Londres ; car si la houille coûte moins cher à Londres, le coke se vend plus cher à Paris. Enfin la compagnie ne peut nier

  1. La compagnie Gas light and coke a monté, depuis six ans, des appareils à distiller le goudron dans son immense usine de Beckton. Elle a pu, depuis lors, diminuer de 8 pence le prix des mille pieds cubes de gaz, tout en augmentant de 2 pour 100 le revenu des actions.