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Page:Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 54.djvu/669

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nos grandes cités ? Nous ne verrions assurément rien de tout cela ; mais, au milieu d’un fouillis inextricable, d’un labyrinthe de ruelles et de logis inégaux se dresseraient pourtant des édifices immenses, d’interminables avenues, des hypogées et des temples précédés de colosses et de colonnades à faire plier la pensée, et tout cet ensemble irait se fondre avec une harmonie de tons incomparable dans les vapeurs lumineuses et les transparences infinies des horizons de l’Orient, Devant un pareil spectacle, nous prendrions en pitié nos rues à trottoir, nos façades monotones, les devantures des magasins et jusqu’aux cafés-concerts. La civilisation moderne est admirable à analyser ; elle résulte de mille facteurs étroitement combinés et exige pour s’étaler l’effort d’une multitude de rouages enchevêtrés ; mais, à raison même de sa complexité, elle a perdu ces effets d’une simplicité et d’une grandeur souveraines qu’avec leur sève vigoureuse les nations primitives purent atteindre d’un bond, en déployant une force naïve, attribut inné de la jeunesse. — On peut dire la même chose de l’époque carbonifère : un concours inouï de circonstances amena l’expansion végétale de cette période. Le monde des plantes, remarquons-le, n’était pas bien éloigné de son point de départ originaire. Il était jeune et relativement imparfait ; mais, à raison même de sa nouveauté, il n’était pas encore rigoureusement limité. Il abondait en parties vertes susceptibles d’une croissance rapide et d’un développement pour ainsi dire indéfini. Il était cependant dépourvu de deux caractères essentiels que les végétaux plus récens ont acquis à la longue et qui constituent ce que nous considérons chez eux comme un progrès, uniquement parce qu’ils se trouvent par ces côtés plus en rapport avec les conditions de milieu qu’ils ont été appelés à subir et qui n’existaient pas dans l’âge dont nous parlons. Ces caractères acquis sont, d’une part, l’accroissement périodique et graduel des parties destinées à avoir une durée et, de l’autre, la spécialisation absolue, par une division plus complète du travail organique, des appareils reproducteurs, doués par cela même d’un degré plus prononcé de concentration et de personnalité.

Le règne végétal, ainsi considéré, est le premier facteur du phénomène des houilles, mais il n’est pas le seul ; il en est deux autres, dont il est indispensable de tenir compte avant d’obtenir la formule génésique des combustibles minéraux. — De ces deux facteurs, l’un consiste dans des conditions de milieu, c’est-à-dire de climat et de température, toutes spéciales ; l’autre, dans la disposition matérielle des lieux où les végétaux se trouvèrent placés. Effectivement, il suffit d’éliminer un des trois termes pour n’avoir plus de formation houillère. Ce qui le prouve, en ce qui concerne le