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règle, mais elle subit bien des exceptions ; elle donnait l’ordre descendant suivant : duc, marquis, comte, vicomte, baron ; au plus bas de l’échelle se trouvaient rejetés le titre de chevalier, et au-dessous celui d’écuyer. On n’assigna pas de rang bien déterminé au titre de vidame, qui se transmettait héréditairement dans quelques familles, mais qui ne pouvait aspirer à un échelon supérieur, car le vidame était, dans le principe, le seigneur que l’évêque ou l’abbé choisissait pour défendre son fief et auquel il remettait en temps de guerre le commandement de ses vassaux. D’ailleurs tous ceux qui portaient en France le titre de vidame, à une seule exception près, relevaient non directement du roi, mais simplement de l’évêque ou de l’abbé, dont leurs ancêtres avaient été les avoués. Quant à la qualification de châtelain, bien que bon nombre de châtellenies eussent pris au moyen âge le caractère de fief héréditaire, elle demeura personnelle et n’entra pas plus dans la hiérarchie nobiliaire que les titres de bailli et de sénéchal, que se transmettaient héréditairement, comme titre d’office, quelques familles. La distinction de chevalier banneret, c’est-à-dire de chevalier commandant à des vassaux, et de chevalier simple ou bachelier avait disparu.

En Angleterre, à la chambre des lords, on retrouve à peu près le même système de graduation que celui qui prévalait en France. Les marquis prennent rang après les ducs, les comtes après les marquis, les vicomtes après les comtes et les barons après les vicomtes. En dehors de la pairie, il s’était constitué chez nos voisins une classe inférieure de noblesse correspondant à celle qui chez nous ne possédait pas de fief de dignité et qu’on appela les petits barons ou baronnets ; avec eux se confondirent les anciens bannerets. Ils n’avaient d’ordinaire que de modestes seigneuries dont ils tiraient la qualification de sir, qui leur est restée. Quant au titre de chevalier (knight], il finit, comme en France, par être une simple marque de noblesse que prirent ceux qui n’avaient point de titre plus élevé, mais il ne constitua qu’un titre personnel que la reine accorde aujourd’hui comme récompense. La qualification d’écuyer (squire) tomba si bas qu’elle finit par être attribuée, comme en France celle de monsieur, à toutes les personnes de quelque respectabilité.

En Allemagne, où la féodalité résista davantage, où les seigneurs s’érigeaient en vrais souverains et n’étaient liés au suzerain que par un lien assez lâche et souvent rompu, le rang des fiefs se régla bien plus d’après la nature de la vassalité que d’après la qualification du fief. Les vassaux immédiats de l’empereur, quel que fût leur titre, se plaçaient au-dessus de ceux dont la dépendance n’était que médiate. Les princes-électeurs avaient sans conteste le premier rang, mais, à part cela, la hiérarchie des titres n’était point observée, d’autant plus que les nobles créés par les