autour de lui l’avaient obligé à demander une femme à la cour de Vienne, Serait-il difficile aujourd’hui de réveiller dans son cœur une ancienne inclination ? Mazarin ne le crut point. Mlle de Gonzague lui parut en même temps, par ses qualités, ses goûts, et aussi les difficultés de sa situation en France, naturellement désignée pour se vouer à l’œuvre qu’il entendait lui confier.
Marie avait alors trente et un ans, mais l’épanouissement de sa jeunesse et un embonpoint naissant ne nuisaient pas à sa beauté. Sa vie avait subi des alternatives diverses. Son père, Charles de Nevers, l’avait quittée de bonne heure ; appelé par l’extinction de la branche italienne des Gonzague à la couronne ducale de Mantoue, il était allé au-delà des monts recueillir son héritage à la pointe de l’épée. Marie vivait avec une sœur plus jeune qu’elle, Anne, la future princesse palatine ; une troisième fille du duc Charles, Bénédicte, avait été faite abbesse d’Avenay. Lorsque Marie parut à la cour, ses charmes ne tardèrent pas à faire impression sur Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII, et elle put se croire un instant promise au premier prince du sang ; dans les brillantes assemblées du Louvre, les deux jeunes gens ne cherchaient et ne voyaient qu’eux. Malheureusement cette inclination déplut à Marie de Médicis, qui déjà avait disposé de la main de son second fils en faveur d’une princesse de Lorraine. Résolue à rompre les projets de Gaston, la reine mère eut recours à un remède héroïque ; Marie de Gonzague se rendait en Italie pour visiter son père ; à quelques lieues de Paris, une troupe d’hommes armés assaillit et dispersa son escorte, s’empara de sa personne et la conduisit au château de Vincennes, où Marie de Médicis lui avait fait préparer une demeure qui ressemblait fort à une prison. L’aventure fit grand bruit, Gaston parlait de reconquérir sa fiancée les armes à la main, lorsque l’intervention de Louis XIII amena la délivrance de la jeune princesse. La reine mère n’en atteignit pas moins son but ; la légèreté et l’inconstance étaient les moindres défauts de Gaston, et peu de mois s’étaient écoulés qu’il avait oublié ses engagemens pour consentir, en fils docile, à l’union imposée par sa mère.
Marie ressentit un profond dépit de cet abandon, tout en dissimulant sous l’air de sérénité enjouée qui lui était habituel la blessure faite à son cœur, et surtout à son orgueil. Le trait distinctif de son caractère, celui qui ressort avec évidence de ses lettres, était un mélange de douceur et même de mollesse toute féminine avec une ambition exaltée, née du souvenir sans cesse présent d’une origine quasi royale. Nature aimante et sensible, d’une piété vive, peut-être eût-elle succombé sous le poids des amertumes de la vie et, comme sa sœur Bénédicte, cherché le repos dans le cloître, si la volonté de remplir une destinée digne de son nom n’eût à plusieurs