Seuls, Dubois et quelques-uns de ses amis du Globe firent entendre le langage de la vraie liberté, c’est-à-dire de la liberté pour tous.
Le centre gauche de la restauration accepta la révolution de juillet sans y avoir eu une part directe et il put un instant espérer de la diriger. Renouvelé dans ses élémens sans rien perdre de son caractère, conduit pour la première fois par de vrais politiques, M. Casimir Perier, M. Thiers, le centre gauche eut assurément, dans ces dix-huit années d’un gouvernement libéral, un rôle considérable et justement populaire. Il prit, soit au pouvoir, soit dans l’opposition, une part éclatante à tous les événemens, à tous les actes, à toutes les discussions parlementaires du règne de Louis-Philippe. Il ne fut cependant jamais, même sous Casimir Perier, le parti dominant. Les chambres et le pays se partagèrent promptement en une droite et une gauche et le centre gauche fut entraîné tour à tour à servir les passions de l’une et de l’autre, sans réussir à les contenir. Dans les dernières années du ministère de M. Guizot, il ne se distinguait presque plus de la gauche. Il ne se refusait à aucun des actes d’une opposition systématique dont les attaques contre les ministres atteignaient directement la couronne elle-même. Si M. Thiers se tenait personnellement en dehors de la campagne des banquets, la plupart de ses lieutenans n’imitaient pas sa réserve, et le pays comprenait si peu les derniers scrupules des partis constitutionnels que les députés du centre gauche et de la gauche dynastique étaient à peine suivis d’un petit nombre de leurs amis politiques quand ils croyaient devoir se retirer d’un banquet d’où les exigences des députés de l’extrême gauche avaient fait écarter le toast au roi.
Après la révolution de février, dans l’effarement d’une catastrophe inattendue, bientôt suivie d’une horrible guerre civile, le centre gauche, la gauche elle-même, se portent en grande partie vers la droite. Toutefois une fraction importante de ces deux partis, renforcée par un certain nombre d’hommes nouveaux, forme bientôt un groupe de républicains conservateurs et libéraux, qui finit par avoir la principale influence dans l’assemblée constituante. La constitution de 1848 témoigne de l’honnêteté de ce groupe, de son ferme libéralisme et de son inexpérience. Toutes ces libertés, que M. Thiers devait appeler plus tard «les libertés nécessaires, » sont consacrées dans leurs principes généraux, sans entrer dans la pratique sous la garantie d’une législation claire et efficace. L’assemblée s’est en vain réservé ou plutôt imposé le devoir de compléter son œuvre par des lois organiques. Elle s’est elle-même condamnée à l’impuissance par la double erreur d’une chambre unique et d’un président de la république élu directement par le suffrage universel. Elle pouvait croire, après sa victoire sur l’insurrection de juin, que