Correspondances, ou Histoires proprement dites, nous ne retenons plus pour nous en servir que ce qu’ils contiennent de plus impersonnel, de plus involontaire et presque de plus inconscient.
C’est avec. des pièces du même genre que M. Albert Babeau a composé ses deux intéressans ouvrages. elles en forment les fondations, elles en sont la substance. De même a fait l’abbé Mathieu pour la Lorraine et M. de Calonne pour l’Artois et la Picardie. On peut alors, mais alors seulement, quand de la poussière même de ces parchemins on a vu le passé renaître, on peut recourir aux documens d’une autre espèce. L’Emile de Jean-Jacques, par exemple, et la Vie de mon père de Rétif de La Bretonne contiennent de précieux renseignemens. M. Babeau s’en est heureusement servi. J’aurais voulu qu’il y joignît les premières pages des Mémoires de Marmontel. Outre qu’elles sont fort jolies, trop jolies peut-être, elles intéressent l’histoire du Limousin, qui passe pour une province pauvre, et elles nous reportent aux environs de 1730. On ne saurait trop relire les Voyages d’Arthur Young ; on y joindra désormais les Lettres du docteur Rigby. Mais les Mémoires proprement dits et les Correspondances surtout ne doivent venir qu’en dernier lieu : on n’y doit prendre que des couleurs pour animer en quelque sorte et faire vivre la sévérité du dessin. Quant aux ouvrages d’un caractère polémique, tels que l’Homme aux quarante écus, de Voltaire, ou tels surtout que l’Ami des hommes, du marquis de Mirabeau, le Dictionnaire philosophique ou l’Encyclopédie, et tant d’autres, voilà ceux dont il faudrait se défier, et voilà ceux pourtant où, comme s’il s’agissait en 1883 d’abattre l’ancien régime vaincu et non pas d’en écrire l’histoire, on va chercher ses argumens et ses preuves.
Cependant, comme vingt autres l’ont dit avant nous, comme nous l’avons dit plusieurs fois nous-même, et comme nous avons à plus d’une reprise essayé de le montrer, l’histoire des trois derniers siècles, un peu partout, mais en France plus qu’ailleurs, ayant été faussée par l’esprit de parti depuis quatre-vingts ans, est presque entière à refaire. Continuerons-nous toujours à l’écrire sur la parole de ceux qui l’ont faite, et de prendre pour autorité dans leur propre cause les déclarations de ceux précisément qu’il s’agit de juger ?
Entrons donc au village et pénétrons dans la maison, non pas du gros fermier, dont les fils, dès ce temps-là, deviennent, s’il plaît à Dieu, procureurs, avocats, médecins, mais dans la maison du laboureur, « propriétaire, métayer, fermier on colon, qui gagne sa vie à la sueur de son front et qui, sans jouir du superflu, possède le strict nécessaire. » En Champagne, dans une province dont la