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la prodigieuse richesse de celles de Florence et de Venise, de Milan et de Naples. Celles-ci possèdent, en une série de trois cent soixante-dix-huit volumes in-folio, les papiers des rois de Naples de la maison d’Anjou. On devine aisément qu’il doit y avoir là de précieuses informations sur l’Anjou et la Provence, ainsi que sur l’administration française transportée dans l’Italie méridionale. Le malheur est que ces volumes, après avoir subi les destinées les plus tumultueuses, sont dans un complet désordre, qu’une reliure tardive a comme consacré. C’est une entière confusion de pièces sans date déplacées et mêlées. La source est cependant si précieuse qu’on y vient puiser de toutes parts : on le ferait beaucoup plus utilement si l’usage en était rendu plus facile. Un pensionnaire de l’École française de Borne, M. Paul Durrieu, a pris pour lui cette tâche. Pour rétablir l’ordre dans ces volumes, qui sont surtout des registres de comptes, il s’est mis à rechercher ce que devaient être l’administration financière et jusqu’à la tenue des livres au XIIIe siècle ; il a retrouvé le sens de beaucoup de formules et de signes d’un perpétuel usage, et, après avoir expérimenté sur cinquante et un de ces in-folio, il nous rend la clé qui permettra désormais de classer, de dater, d’expliquer presque chacune de ces pièces comptables, presque chacun de ces documens historiques. Ce qu’il a déjà publié à ce sujet dans nos Mélanges d’archéologie et d’histoire peut faire prévoir quel caractère d’utilité pratique son travail d’ensemble offrira.

M. Delaville Le Roulx a été redemander notre bien commun, je veux dire l’histoire de France, plus loin encore, jusqu’à Malte, aux archives de La Valette. La primitive histoire de l’ancien ordre de Saint-Jean de Jérusalem se rattache à celle de la première croisade et des établissemens français en terre-sainte. Peut-être même l’institution première remonte-t-elle à une des fondations de Charlemagne. La plupart des grands maîtres ont été de nationalité française ; les membres de l’ordre ont joui en France de beaucoup de considération, de biens et d’honneurs. En succédant aux Templiers, ils ont hérité de leurs droits et de leurs possessions en Orient. M. Delaville Le Roulx, qui s’était déjà fait remarquer par sa collaboration à l’active société de l’Orient latin, a publié dans la Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome un inventaire général de ces archives de La Valette, qu’il fera suivre prochainement d’un travail analogue à celui de M. Durrieu.


II

A côté de l’histoire générale, directement intéressée aux travaux qu’on vient d’énumérer, il y a l’histoire spéciale des lettres et des arts, qui en est le perpétuel et éloquent commentaire, qui en résume