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premières découvertes ne parut qu’après sa mort. Il avait ouvert la mine et tracé la voie à l’avenir. Mais, après Bosio, les catacombes romaines furent exploitées moins comme une source de renseignemens destinés à compléter les témoignages proprement littéraires que comme une carrière de reliques et d’objets de haute curiosité. Des érudits cependant et des artistes y trouvèrent la matière de publications intéressantes à divers titres. On en exhuma des inscriptions que Bosio n’avait pas relevées, on décrivit des parties ou des monumens qu’il n’avait pas vus ; mais la ténacité, l’esprit de suite, la méthode, la largeur de vues manquèrent en général aux explorateurs. Avant M. J.-B. de Rossi, nul ne conçut l’idée d’une description scientifique à la fois complète et exacte des catacombes, nul n’entreprit de déterminer l’emplacement de chaque nécropole, d’en marquer les dispositions, d’en retrouver les noms, d’en suivre les excavations successives, de retracer l’histoire des principales cryptes dans leur état primitif et dans les transformations qu’elles ont subies.

C’est la gloire incontestée de M. de Rossi d’avoir commencé ce travail et, en plusieurs maîtresses parties, de l’avoir achevé. Le pourra-t-il terminer ? On doit le souhaiter, mais cela est douteux. En matière d’histoire pure une vie d’homme suffit à ressusciter la vie de plusieurs générations. Ici, que de difficultés ! que d’obstacles matériels pour lesquels il faut patience et longueur de temps ! Les fouilles ne se font pas aussi vite que les études de textes et les déchiffremens de manuscrits. Les emplacemens exacts de toutes les nécropoles chrétiennes ne sont pas connus précisément, et eût-on le fil d’Ariane, on n’y avance pas comme dans des rues ouvertes au soleil. Des matériaux les obstruent qu’il faut déblayer, et ces matériaux, membres brisés pour la plupart de précieux monumens, doivent être passés au crible en quelque sorte. On n’avance que lentement, pas à pas et à grands frais. Mais c’est ici le lieu de dire que qui a commencé a plus d’à moitié fait. En tous cas, nul désormais ne peut parler des catacombes de Rome sans se mettre à la suite de M. de Rossi et, sinon accepter toutes ses conclusions historiques ou dogmatiques, au moins sans s’appuyer sur les descriptions qu’il a faites et sur les monumens qu’il a découverts, et qu’il a su, par une méthode nouvelle et très heureuse, ne pas séparer des lieux mêmes où il les a trouvés. C’est aussi l’avis très formel et sincère de M. Théophile Roller, qui a publié, il y a quelques mois, deux superbes volumes illustrés de planches gravées ou photographiées d’une scrupuleuse exactitude, intitulés : les Catacombes de Rome, fruit d’un long et consciencieux travail pendant un séjour de quinze ans en Italie, de visites assidues dans les cimetières