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Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 58.djvu/381

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aisément, je crois, que c’est Jésus ou l’étoile qui forme ici le centre de la composition. Cependant l’étoile seule lui donne un sens proprement chrétien. Otez en effet l’étoile, la peinture devient un indéchiffrable rébus. Je ne saisis pas bien ce qu’il faut entendre par la façon catholique ou protestante de traiter ce sujet. L’artiste assurément n’a songé qu’à figurer la haute fortune annoncée à Marie étonnée au sujet de son enfant. A-t-il pensé à mêler ici l’Ancien-Testament au Nouveau ? A-t-il songé à Isaïe ? Je n’en sais rien, et la chose paraît douteuse. Est-ce qu’on ne parle pas de l’étoile dans l’évangile ? N’y a-t-il pas une étoile qui brille au-dessus de la tête du divin nouveau-né ? Le symbolisme ici, s’il y en a, est à son minimum. C’est de l’histoire légendaire, et rien de plus, figurée d’un pinceau vif, aisé, naturel, sans aucune nuance d’idéalisme. L’étoile, encore une fois, donne seule un cachet chrétien à une scène qui, sans elle et trouvée ailleurs qu’aux catacombes, ne présenterait aucun caractère religieux.

Ainsi sans parler de ces fresques des catacombes que M. Roller appelle fort modérément demi-païennes[1] et qui le sont tout à fait, ou, si l’on veut, ne sont pas plus païennes que chrétiennes, mais où il faut voir d’innocens lieux-communs de décoration courante et banale, sans parler des scènes de vendange ou de moisson, des pastorales de l’atrium du cimetière de Domitilla ou de l’arcosolium du caveau de saint Janvier, ni des gracieux motifs des paons ou des colombes à la coupe, il y a dans les catacombes nombre de sujets peints qui, trouvés en lieu profane, n’eussent pas mis à la torture l’esprit des interprètes et des symbolistes à outrance et où ils n’auraient voulu voir que de gracieux motifs d’ornementation, ou des scènes de la vie domestique, ou de simples fantaisies d’artiste.

Les monumens figurés des catacombes sont autant de témoignages de l’art d’une époque, mais non d’un art proprement chrétien. Ni dans les types, ni dans la manière de les rendre, ni dans l’expression des physionomies, le pinceau ou le ciseau des artistes ne s’est élevé au-dessus du niveau commun, n’a trouvé un nouvel idéal, ni découvert de nouveaux procédés d’expression.

J’abonde, par conséquent, sur ce point dans l’opinion de M. Roller. J’irai même plus loin que lui et soutiendrai volontiers que l’art dans les catacombes, comme au dehors, à la même époque, est naturaliste, c’est-à-dire que la plupart des monumens figurés qu’on y rencontre n’ont pas deux sens, comme il l’entend avec beaucoup, d’autres, mais n’expriment en général que ce qu’ils montrent aux yeux.

  1. Planche XXIX, les 4 figures.