Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 60.djvu/458

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

compte des ouvrages présentés par les sculpteurs à l’Exposition nationale, ouvrages excellens pour la plupart, pour la plupart déjà connus et déjà décrits, et dont la réunion a permis de constater les progrès accomplis, depuis quelques années, par notre jeune et brillante école de sculpture française, continuatrice glorieuse des traditions nationales. Nous nous excuserions plus volontiers de passer sous silence la gravure, habituée aux oublis de ce genre, et qui représente cependant l’art français dans ce qu’il a de plus souple à la fois, de plus personnel et de plus vigoureux. Mais, pour les peintres comme pour les sculpteurs, comme pour les architectes, comme pour les graveurs, une sèche nomenclature des noms des exposans, accompagnée de quelques lignes élogieuses ou de quelques réserves chagrines, nous eût paru irrespectueuse, d’une part, et convenir bien peu, d’autre part, au cadre que nous nous étions proposé. C’est l’exposition triennale dans les causes qui l’ont rendue nécessaire dans son organisation, dans son but, dans son avenir que nous avons eu le désir de montrer, bien plus que la réunion fortuite des œuvres qui ont pu s’y rencontrer cette aimée.

Nous ne terminerons cependant pas sans conclure cet examen rapide. L’Exposition nationale de 1883 a été une tentative heureuse : elle a sauvé, par les œuvres fortes qu’elle contient et par le résumé rassurant qu’elle présente de l’état actuel de l’art en France, le principe des expositions d’état, elle l’a mis hors de toute atteinte et au-dessus de toute discussion. Elle était à peine ouverte qu’elle était universellement acceptée jusque dans ses conséquences. Si elle n’a pas donné tous les résultats qu’on serait en droit d’attendre d’une expérience nouvelle, il semble facile de préciser dès maintenant à quelles conditions sera assuré le complet succès de l’Exposition de 1886.

Ce qui paraît avoir manqué davantage à l’Exposition qui finit, c’est que les artistes n’ont pas eu la ferme confiance qu’elle serait entreprise. Jusqu’au dernier moment, — alors que déjà fonctionnait le jury, — un grand nombre d’entre eux se persuadaient qu’elle n’aurait pas lieu. C’est à cette incertitude prolongée que paraissent surtout imputables les quelques défauts de l’entreprise. Annoncée plusieurs années à l’avance et dès la clôture de l’exposition actuelle, saluée par les uns et attendue comme une occasion excellente de se produire en pleine lumière, subie par les autres comme une nécessité inévitable de lutte où s’abstenir serait déserter, l’exposition d’état réunirait, en 1886, un plus grand nombre d’œuvres nouvelles. Les œuvres déjà appréciées ne disparaîtraient pas complètement, sans doute ; mais l’élite de nos artistes, en acceptant trois ans à l’avance un rendez-vous solennel, se préparerait à y paraître avec des morceaux qui n’auraient pas encore affronté le