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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 novembre.

Une singulière partie est engagée au moment présent en France, et s’il ne s’agissait des plus graves intérêts, peut-être de l’avenir du pays, le spectacle ne laisserait pas d’êire piquant. Oui, à la condition de se souvenir du conseil de M. Thiers, de ne rien prendre au tragique, mais de ne pas prendre les choses trop à la légère, on pourrait se donner la satisfaction de suivre les mouvemens de l’échiquier, de compter pour ainsi dire les coups, et de se demander à qui restera la victoire dans cette partie assez embrouillée que le gouvernement lui-même a engagée, dont l’enjeu est le choix d’une politique. Le ministère, il est vrai, s’est arrangé pour s’assurer un premier avantage par le débat un peu précipité, un peu impatient, qui s’est ouvert dès le début de la session sur les affaires de Tonkin et sur nos relations avec la Chine. Il a joué avec une certaine hardiesse en allant au-devant du combat, en défiant ses adversaires, et il a enlevé le dénoûment avec une dextérité qui n’est pas sans reproche, par la production d’un document d’une origine au moins équivoque. Il a réussi, il a eu, du premier coup, la majorité parlementaire qu’il cherchait, mais les discussions de ce genre sont le plus souvent dominées par des considérations d’honneur ou d’intérêt national, et les témoignages de confiance restent pour ce qu’ils valent. Quel que soit ce premier vote, le ministère n’a point évidemment cause gagnée ; le débat sur le Tonkin et sur la Chine n’est qu’une escarmouche préliminaire, un prologue plus ou moins heureux. La question n’est pas précisément là ; elle est dans la politique tout entière, dans l’interprétation pratique du discours de M. le président du conseil au Havre, du discours plus récent de M. le ministre de l’intérieur à Tourcoing ; elle est dans la direction générale que les principaux