Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 60.djvu/584

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les poissons n’habitent pas indifféremment toutes les eaux ; il faut, pour qu’ils puissent y vivre, que celles-ci renferment en dissolution une certaine quantité d’air respirable. Il faut, de plus, qu’elles ne contiennent pas une trop grande proportion d’acide carbonique ou d’hydrogène sulfuré, non plus que des matières terreuses ou organiques qui empêcheraient le fonctionnement des organes respiratoires ou qui altéreraient la composition du liquide. Les poissons, en effet, respirent par des branchies ou lamelles en forme de dents de peigne, qui se trouvent placées en arrière des yeux et qui sont recouvertes d’un opercule corné fonctionnant comme une soupape. Ils avalent par la bouche l’eau qui sort par ces opercules après avoir laissé dans les branchies l’air qu’elle renfermait. Si cette eau est chargée de matières inertes qui gênent le jeu des organes, ou si elle a été privée de son oxygène par des substances en décomposition, elle est mortelle pour le poisson. Les eaux doivent de plus renfermer les substances nécessaires à l’alimentation de leurs habitans. C’est la végétation aquatique qui y pourvoit en produisant des plantes qui servent soit directement à la nourriture de certaines espèces, soit à celle d’une multitude d’animaux dont d’autres espèces font leur proie. Ces plantes jouent encore un autre rôle ; elles absorbent le carbone de l’acide carbonique contenu dans l’eau, en dégagent l’oxygène, et contribuent ainsi à la rendre plus respirable. À ce point de vue, la constitution géologique du sol n’est pas sans influence sur les espèces de poissons qui habitent les rivières, puisque c’est de cette constitution que dépend la nature des plantes qui les nourrissent. C’est là toutefois une question encore obscure et qui demande à être étudiée de près.

L’eau atteignant son maximum de densité vers 4°, les couches qui ont cette température sont les plus lourdes et tombent au fond. Si la température de l’air est supérieure à 4°, les couches en contact avec l’atmosphère seront plus chaudes que celles du fond ; si, au contraire, la température atmosphérique est inférieure à 4°, elles seront plus froides. Il se produit donc, non-seulement d’une saison à l’autre, mais même du jour à la nuit, un courant vertical qui contribue à maintenir dans la masse aqueuse un degré de chaleur à peu près uniforme et à en aérer successivement toutes les parties. Les poissons, étant des animaux à sang froid, ne peuvent supporter un abaissement de température trop prolongé ; la plupart meurent à — 10 degrés. Aussi, pendant l’hiver, se réfugient-ils dans les fonds où le froid est moins rigoureux, et où ils vivent dans un état d’engourdissement presque absolu. Ils sont, pour la plupart, pourvus d’une vessie natatoire renfermant des gaz dont ils peuvent à