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mouvement de reprise. Le public financier ne s’y est pas trompé. En désignant tour à tour le Crédit foncier, la maison Rothschild, la Banque de Paris, la Banque ottomane, il a considéré comme un fait acquis que les puissances financières dont le groupement constitue pour lui la haute banque avaient engagé la lutte contre le découvert, et il n’a pas mis en doute que le découvert dût être forcément battu.

L’intervention du parti de la reprise a été du reste, on doit le constater, fort opportune ; les raisons de grande baisse ont disparu, et la situation fournit des motifs suffisans de hausse pour qu’une campagne puisse être tentée avec espoir de résultats fructueux.

Le plus sérieux de ces motifs est probablement la détente qui s’est produite dans les rapports de l’Allemagne et de la Russie, et qui a dissipé les appréhensions concernant l’éventualité de complications extérieures au printemps. Les assurances les plus pacifiques ont été données à la fois à Saint-Pétersbourg et à Berlin : les marchés étrangers se sont aussitôt raffermis ; à ce point de vue déjà, nos baissiers ne devaient plus compter sur ces coups de panique de Berlin et de Vienne qui leur avaient été d’un si utile secours à plusieurs reprises en 1883.

À l’intérieur, le règlement de la question budgétaire a fait cesser toute incertitude sur les événemens financiers qu’il convenait de prévoir. Un emprunt de 350 millions, voilà l’opération que devra effectuer prochainement le ministre des finances, aussitôt que le vote du budget extraordinaire par le sénat aura fourni l’autorisation nécessaire. Avec cette somme, les déficits de 1883 et de 1884 seront comblés, et l’état aura de quoi subvenir à la partie des grands travaux publics dont il reste chargé. Quant à l’extension du réseau de nos voies ferrées, elle est assurée par les conventions votées à la fin de 1883 par les chambres et par les assemblées des compagnies, et entrées en vigueur depuis le 1er janvier 1884. Le programme est tracé pour une période de dix années. Il ne plane plus aucun inconnu sur ce grave problème dont la solution avait paru pendant longtemps justifier les plus vives inquiétudes.

On sait qu’en janvier des coupons sont mis en paiement sur un très grand nombre de valeurs et que cette échéance apporte à l’épargne un contingent de près de 1 milliard. Il est impossible d’évaluer quelle fraction de cette somme énorme viendra s’employer à la Bourse en achats de rentes, d’obligations et de valeurs diverses : à coup sûr, l’influence de ces capitaux ne sera pas insensible. On a observé avec juste raison qu’au plus fort de la baisse, en décembre, les porteurs de titres ne commençaient que difficilement à se décider à vendre. Les réalisations de portefeuille auraient pris peut-être un mouvement rapide de progression si la dépréciation s’était continuée. Elles ont été, au contraire, complètement arrêtées par la reprise, et la confiance