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est revenue plus vite encore qu’on n’eût osé l’espérer. Si quelque défaillance subite ne cause pas au marché une déception que, dans ses dispositions actuelles, il supporterait mal ; si les capitalistes peuvent se convaincre, par une continuité de bonne tenue des cours ou par un mouvement lent d’amélioration, que c’est bien la haute banque qui a repris les rênes de la spéculation, on peut compter sur un large concours des capitaux disponibles de janvier. Toutes les catégories de valeurs n’en profiteront pas dans une égale mesure, et il est plus que probable que les achats de l’épargne porteront à peu près exclusivement sur les rentes et les obligations des Chemins de fer, de la Ville ou du Crédit foncier ; l’ensemble du marché aura été néanmoins très heureusement affecté, le réveil de la confiance devant ramener peu à peu une clientèle même aux valeurs à revenu aléatoire, du moins à celles que l’épreuve des deux années dernières permet de tenir pour sérieuses.

On a beaucoup parlé de l’emprunt de 350 millions que le ministre des finances doit se proposer d’émettre en 1884. L’autorisation n’en est pas encore votée. Le ministre ne peut donc avoir pris encore aucune décision soit sur la date, soit sur le mode de l’emprunt. D’après les derniers bruits en circulation, M. Tirard aurait résolu de lancer l’opération dans la première quinzaine de février.

Mais il hésiterait encore entre une souscription publique ou une vente successive aux guichets des trésoriers généraux. D’autres informations feraient supposer que rien n’est encore arrêté, même en ce qui concerne le principe de l’emprunt ; une partie de la spéculation a même cru trouver, dans une récente décision du ministre des finances, l’indice d’un ajournement à l’année prochaine. Cette décision, insérée au Journal officiel du 10 courant, porte que l’intérêt attaché aux bons du Trésor dont l’échéance ne dépasse pas une année est fixé, à partir du 9 janvier, à 3 pour 100 l’an. De plus, des obligations à court terme 4 pour 100 seront émises au pair, jusqu’à concurrence de 29,719,500 fr., en vue du remboursement d’obligations analogues arrivées à échéance pour une somme égale. Les bons du Trésor de trois à huit mois bénéficiaient de 2 1/2 pour 100 ; il n’était alloué 3 pour 100 qu’aux bons de huit mois à un an. La récente décision assure 3 pour 100 à tous les bons, sans distinction, dont l’échéance ne dépasse pas une année. Or, le ministre des finances peut négocier de ces bons jusqu’à concurrence de 400 millions. Si le public se jetait sur ces valeurs avec une avidité telle que la somme entière pût être placée, M. Tirard ne pourrait-il pas être tenté de renvoyer à l’exercice prochain l’émission, devenue inutile, d’un emprunt en 3 pour 100 amortissable, plus onéreux, quel que soit le cours d’émission, que l’opération provisoire en bons du Trésor ? Il en résulterait pour le budget un allégement, fort