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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 62.djvu/193

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dans la Caroline du Sud et demandait les pouvoirs nécessaires pour maintenir l’intégrité de l’Union et assurer l’exécution des lois par tous les moyens constitutionnels. « En pareil cas, dirait le message, c’est sur l’étendue des devoirs du gouvernement que doivent être mesurés ses pouvoirs. » Le 21, le sénat fut saisi d’un projet (force bill) qui conférait au président les pouvoirs réclamés par le message. Calhoun y répondit par le dépôt d’une série de résolutions qu’il développa et dans lesquelles il avait formulé la théorie de la nullification. Webster, de son côté, présenta des contre-résolutions qui contenaient le résumé des doctrines constitutionnelles qu’il avait exposées dans son grand discours.

Le 1er février était le jour fixé par la convention de la Caroline du Sud pour la mise en vigueur de l’ordonnance. Calhoun en fit ajourner l’exécution jusqu’au vote du congrès sur les propositions de révision du tarif dont il était saisi. Le président, qui était résolu à réprimer énergiquement toute tentative de rébellion[1], était en même temps disposé à donner aux griefs du Sud une large satisfaction. Il avait fait, en conséquence, préparer un projet de loi qui prit le nom de son rapporteur Verplanck, représentant de New-York, et qui ramenait les droits au taux du tarif de 1816. Ce projet rencontra dans les états du Nord une violente opposition ; et Webster qui, après avoir à l’origine soutenu avec éclat les principes de libre échange, était devenu l’ardent défenseur de la protection, soutint que toute révision du tarif dans les circonstances présentes serait considérée comme une capitulation devant les exigences d’un état rebelle. Moins absolu dans le système dont il avait été le promoteur, et préoccupé par-dessus tout du désir de prévenir un conflit dont s’alarmait son patriotisme, Clay prit l’initiative d’un de ces compromis auxquels son nom est demeuré attaché et à l’aide desquels il parvint plus d’une fois à conjurer ou à ajourner les crises qui menaçaient l’existence de l’Union, il proposa au sénat, le 12 février, de substituer à la réduction immédiate des droits qu’aurait opérée le Verplancks’ Bill une réduction progressive qui devait ramener ces droits en 1842 à un taux uniforme de 20 pour 100. Le préambule dont ce projet était précédé déclarait en termes formels que désormais les droits de douane auraient uniquement pour but d’assurer au gouvernement les revenus nécessaires et cesseraient d’avoir pour objet la protection ou l’encouragement d’une branche quelconque de l’industrie nationale. » Bien loin de trahir, comme on l’en

  1. Il annonçait hautement que, si Calhoun et ses amis mettaient à exécution leurs projets, il les ferait pendre sans hésiter. « Je les aurais fait pendre à une potence plus haute que celle d’Aman, répétait-il dans ses dernières années. Cet acte aurait été le meilleur de ma vie et il aurait servi d’exemple aux traîtres de tous les temps.