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l’arrêt d’avril 1717, qui prescrivent de recevoir les billets en paiement des impositions et qui enjoignent aux comptables de rembourser en espèces ceux qui leur seront présentés jusqu’à concurrence de ce qu’ils auront dans leurs caisses ; et il y ajoute ces prescriptions nouvelles et significatives : — Dans les villes où la banque a des bureaux, les comptables tiendront leurs caisses en billets, et s’ils y conservent du numéraire, en cas de diminution des espèces, ils en supporteront la perte ; — tous transports d’espèces dans ces villes sont interdits, excepté pour le service de la banque et sur un certificat émané de ses bureaux ; — les créanciers pourront exiger de leurs débiteurs le paiement en billets de leurs créances, excepté pour les appoints. On ne peut s’y méprendre : la guerre est de plus en plus déclarée aux espèces métalliques, et c’est d’autorité qu’on entend leur substituer le papier dans la circulation,

La banque générale, institution privée, ne fondant sa circulation que sur la confiance qu’elle inspirait, aurait suffi et utilement répondu aux besoins ordinaires et réguliers du commerce : la banque royale, établissement de l’état, en demandant aux privilèges et à la contrainte les moyens d’accroître l’émission de ses billets, se prépare au rôle qu’elle aura à remplir pour développer et transformer la compagnie d’Occident.

La société concessionnaire de la Louisiane avait eu à ses débuts (août 1717) moins de succès que la banque. Pendant un an, elle forma son capital, organisa son administration, commença ses opérations de colonisation et de commerce sans que ses actions pussent atteindre le pair : il est vrai que le jour où elles purent être vendues 500 livres, les souscripteurs primitifs réalisèrent un profit de 150 pour 100, puisqu’ils n’avaient eu à payer que 200 livres pour se procurer 500 livres en billets de l’état, qui perdaient au moins 60 pour 100, et qu’ils avaient échangés contre une action d’Occident : ce premier bénéfice devint un puissant stimulant pour la spéculation.

Law reconnut que, pour exciter la confiance du public, il fallait que la compagnie s’assurât des profits moins éloignés que ceux de la Louisiane. Le tabac y était cultivé avec succès : l’exploitation de la ferme des tabacs se rattachait donc naturellement aux concessions de la société et elle se rendit adjudicataire de cette ferme (septembre 1718) en portant à 4 millions le prix du bail, qui n’était que de 2,200,000 : elle obtint, en outre, sans augmentation de ce prix, le privilège exclusif de la vente des tabacs, qui n’était pas compris dans la ferme. Ce fut le signal d’une hausse des actions, qui, à la fin de 1718, se négocièrent quelquefois à 15 et 20 pour 100 de prime, — mais sans pouvoir conserver ce cours.

Vers cette époque, Law imagina, pour soutenir le cours des