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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 62.djvu/676

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des billets sont soumises à une surveillance réciproque et obligées d’échanger le papier les unes des autres. Ces restrictions sont très gênantes, et les banques qui émettent des billets en Suisse n’apprécient pas beaucoup la situation qui leur est faite. En Écosse, les banques d’émission sont régies, comme en Angleterre, par le fameux act de 1844 de Robert Peel, qui n’autorise l’émission que pour un certain chiffre répondant à des valeurs d’état que possèdent les banques : au-delà, tout billet doit être couvert par une représentation équivalente en espèces métalliques. De plus, en Écosse, toute banque qui émet des billets au porteur est soumise à la responsabilité illimitée, c’est-à-dire que les actionnaires sont responsables solidairement et sur toute leur fortune des accidens qui pourraient survenir. Enfin, on ne peut pas considérer les banques d’Écosse en elles-mêmes, elles n’ont pas pour ainsi dire d’existence propre, elles s’appuient toutes sur la Banque d’Angleterre, c’est là qu’elles possèdent leurs réserves et leur encaisse, c’est à cet établissement qu’elles s’adressent dans les momens de crise, et on ne sait pas ce qu’elles deviendraient si cet appui, qui leur est indispensable, venait à leur manquer.

En Suède, il y a une banque d’état dont les billets seuls ont le privilège d’être des legal tender; elle est placée sous le contrôle et la surveillance du gouvernement. Elle peut émettre des billets jusqu’à concurrence de son capital social versé, augmenté de son encaisse métallique. La circulation actuelle de cet établissement est de 50 millions de francs. A côté d’elle sont placées d’autres banques, dites enskilda banks, qui émettent aussi des billets au porteur avec autorisation de l’état, et qui les gagent soit par des fonds publics, soit par des affectations hypothécaires et par une encaisse plus ou moins considérable. Ces billets ne jouissent pas du privilège des legal tender, on peut les accepter ou les refuser, et les actionnaires des établissemens qui les émettent sont, comme en Écosse, responsables solidairement. La circulation fiduciaire des enskilda banks est de 78 millions; elle est parfaitement assurée, très solide. Il n’y a jamais eu de perte, a dit un homme fort compétent, M. 0. Wallenberg, directeur Lui-même d’une de ces banques, celle de Stockholm, et qui a bien voulu communiquer des renseignemens très intéressans sur la question à la Société des économistes. Mais est-ce bien là la liberté d’émission telle que l’entendent ses partisans, et la circulation fiduciaire ainsi établie répond-elle au but qu’on se propose ?

On parle aussi de la liberté aux États-Unis; dans ce grand état, car il s’agit là d’un grand état, on a constitué, au moment de la guerre de sécession, un grand nombre de banques, dites nationales,