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bon dans le mariage. Mais ce n’est pas mon affaire. Le bon ménage est très en honneur en Chine. Une vieille chanson du Livre des vers célèbre les bons ménages dans une ode naïve dont voici la traduction :


Le coq a chanté ! dit la femme.
L’homme répond : On ne voit pas clair,
Il ne fait pas encore jour.
— Lève-toi ! et va examiner l’état du ciel !
— Déjà l’étoile du matin a paru : —
Il faut partir ; souviens-toi
D’abattre à coups de flèches
L’oie sauvage et le canard.

Tu as lancé tes flèches et atteint le but.
Buvons un peu de vin
Et passons ensemble notre vie :
Que nos instrumens de musique s’accordent,
Qu’aucun son irrégulier
Ne frappe nos oreilles !


Telle est la chanson des époux, qui ne sont ni Roméo ni Juliette, quoiqu’on pourrait s’y méprendre. Elle n’a d’autre ambition que d’enseigner les devoirs et non de poétiser les grandes passions. Et ce chasseur, n’allez pas croire que ce soit un pauvre montagnard indigne de votre intérêt, obligé de chasser pour soutenir sa dure existence. C’est un homme d’une condition opulente, car l’ode se termine ainsi :


Offre des pierres précieuses
À tes amis qui viennent te voir ;
Ils les emporteront
Suspendues à leur ceinture.


J’ai dit que le divorce était condamné par l’usage. C’est surtout dans la société aristocratique qu’il est le plus méprisé. Plutôt que de livrer au grand jour les secrets de la vie intime, lorsque les causes de la rupture ne sont pas extrêmement graves, on préfère le système des concessions mutuelles.

Du reste, la femme est intéressée, pour des questions de vanité, à conserver la paix et à ne pas désirer le divorce, car elle ne possède rien que les honneurs attachés à sa qualité d’épouse.

Le mariage donne à la femme tous les privilèges dont jouit le mari, même celui de porter l’uniforme de son rang. Dans ces conditions, divorcer serait d’une extrême maladresse, et, si la femme le comprend, le mariage restera uni.