La petite Diane, « la Dianette, » de M. Falguière, qui est placée à l’entrée même du jardin, donne une idée plus juste que flatteuse de la plupart des sculptures exposées. M. Falguière veut, bien décidément, du mal à Diane. En 1882, il la représentait comme une fillette maussade et de mesquine tournure; cette année, il soumet la déesse à la torture d’une attitude disloquée. Imaginez une figure nue posant sur la pointe du pied, la jambe droite, qui porte le corps, toute raide, la jambe gauche lancée horizontalement en arrière, le torse penché, à mieux dire couché en avant. Le bras gauche, dont la main est armée d’un arc, se projette également en avant, et la main droite en l’air tient l’extrémité de la flèche. Aucun modèle, fût-il même choisi parmi les gymnastes et les acrobates, ne saurait garder cette pose l’espace d’une seconde. Ou, perdant l’équilibre, il tomberait sur le visage, ou, s’efforçant de rester debout, il fléchirait involontairement la jambe sur laquelle il porte. La rigidité de cette jambe est absolument contraire au mécanisme du corps humain ; c’est une impossibilité anatomique. Cette pose, qui viole la nature, ne profite pas à l’art. Vue de face, la Diane a l’air de n’avoir qu’une seule jambe; vue par les deux profils, elle présente des lignes excentriques et anguleuses ; on dirait une figure couchée sur un pivot. Quant à dire l’effet qu’elle produit vue de dos, nous nous y refusons ; la figure de M. Falguière est une statue qu’on ne peut décemment regarder de dos. Les mérites de la facture rachètent-ils la bizarrerie de la conception? La tête, grassouillette et ébauchant un sourire, manque de précision dans le modelé et de caractéristique dans le type. Les formes du corps, imparfaitement déterminées dans la partie inférieure, tiennent autant de celles du jeune homme que de celles de la jeune fille ; hanches étroites, bassin peu développé, jambes nerveuses. L’exécution des chairs, par petites boulettes rapportées et écrasées du pouce, manque d’ampleur et de franchise. Il y a toutefois, dans cette figure, un jet, un enlèvement et une grâce juvénile qui séduisent. Si on la voit de face, la lumière qui se joue sur le visage et éclate sur le haut de la poitrine, la pénombre qui baigne les seins et le ventre donnent au buste des plans moelleux et une vénusté à la Prudhon. Au cas où M. Falguière pousserait le paradoxe jusqu’à sculpter sa Diane en marbre, nous souhaitons que ce marbre soit un jour mutilé comme la Psyché du musée de Naples ou l’Éros du Vatican; ce sera alors une œuvre charmante. Mais, en attendant que cette Diane ait la bonne fortune de perdre ses bras et ses jambes, nous quitterons M. Falguière, qui paraît ne plus songer à l’idéal statuaire, pour les sculpteurs qui continuent d’y croire.
Œdipe et le Sphinx sont aux prises dans le groupe de M. Lanson. Le héros est nu et sans armes. Son corps se renverse légèrement