deux allées plantées de grands arbres. Le buste de Claude Bernard repose sur un hermès ; un jeune homme nu, vu de dos, s’approche de la gaine, le bras élevé et portant une couronne. Quels éloges mérite M. de Gravillon pour avoir trouvé la belle et poétique attitude de cette figure, si toutefois ce n’est pas une réminiscence de l’adorable Jeunesse de Chapu ? Une œuvre qui paraît plus originale est celle qu’a conçue M. Marquet de Vasselot pour les mines de Bruay. Un mineur, en tenue de travail, gravit les degrés du monument funéraire et désigne du doigt le buste qui le surmonte. M. Marquet de Vasselot a su garder du style à cette figure toute réaliste. Revenons aux images des vivans, qui sont innombrables, mais parmi lesquelles nous mentionnerons seulement le buste tourmenté et expressif de Victor Hugo, par M. Rodin, le buste du professeur Charcot, par M. Dalou, dont la tête trop petite paraît hors de proportions avec les épaules, et le buste du docteur Mesnet, par M. Franceschi, où s’est surpassé ce renommé portraitiste en marbre.
M. Chapu expose deux figures décoratives largement traitées. Ces statues, destinées à faire pendans, représentent, l’une, Proserpine agenouillée et cueillant des narcisses ; l’autre, Pluton, baissé dans l’herbe et fixant les yeux sur la jeune fille qu’il va ravir à la terre. On aimera surtout la Proserpine, dont le visage et l’attitude ont la grâce charmante de la renaissance et dont les draperies ont l’ampleur même de l’antique. Ces deux marbres, qui doivent être placés dans le parc de Chantilly, y feront le meilleur effet. Le groupe de bronze de M. Caïn ne fera pas moins bien au milieu du Jardin des Tuileries. C’est un rhinocéros attaqué par des tigres. Le monstrueux animal plonge sa corne dans le ventre d’un des tigres renversé, tandis que l’autre assaillant se brise les dents et s’aplatit les griffes sur la carapace du pachyderme. Ce combat sauvage atteint à l’impression du drame. On ne saurait mettre plus de force dans le mouvement, plus de chaleur vitale dans l’exécution. Si Barye était le Fyt des sculpteurs, Caïn en est le Snyders. — Finissons, car, même pour les traiter selon leurs petits mérites, nous estimons qu’il est inutile de signaler les innombrables statues de genre, de fantaisie extravagante ou de bas réalisme, qui encombrent le jardin : tels les savetiers, les garçons bouchers, les serruriers, les paralytiques, les bonnes d’enfans, les funambules et les danseuses. Puisqu’il s’agit d’une exposition de sculpture, pourquoi parler de choses qui ne sont pas de la sculpture ?
HENRY HOUSSAYE.