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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 63.djvu/626

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On remarquera la tradition populaire qui met le soleil et la lune dans chacune des mains du premier homme. Le soleil et la lune symbolisent chez nous le masculin et le féminin, et c’est de leur réunion que date l’ère de l’humanité souffrante, abandonnée. Cette tradition se rapproche du texte de la Bible et a quelque rapport avec l’aventure de la pomme dans le paradis terrestre. Nous représentons la même catastrophe par la rencontre subite du soleil-masculin et de la lune-féminin. C’est, je crois, une manière aussi voilée de faire comprendre le péché originel, mais un peu mieux spécifiée.

Cette préface de l’histoire des hommes précède immédiatement le récit de leurs premiers essais de civilisation, si l’on peut exprimer par ce mot les premiers pas de l’homme sur la terre et ses premières conquêtes sur l’ignorance.

La notion d’une Providence céleste veillant sur les hommes et fécondant leurs efforts apparaît dans notre histoire avec une grande force de vérité, par ce fait que les hommes ont été gouvernés par des empereurs d’une sagesse inspirée et qui ont été les organisateurs de la civilisation chinoise. Ces empereurs sont considérés comme saints. L’histoire ne leur assigne pas de date certaine, mais nous apprend quels furent leurs travaux.

Le premier empereur est appelé l’empereur du ciel. Il a déterminé l’ordre du temps, qu’il a divisé en dix troncs célestes et douze branches terrestres, le tout formant un cycle. Cet empereur vécut dix-huit mille ans. Le second empereur est l’empereur de la terre ; il vécut aussi dix-huit mille ans ; on lui attribue la division du mois en trente jours. Le troisième empereur est l’empereur des hommes. Sous son règne apparaissent les premières ébauches de la vie sociale. Il partage son territoire en neuf parties, et, à chacune d’elles, il donne pour chef un des membres de sa famille. L’histoire célèbre pour la première fois les beautés de la nature et la douceur du climat. Ce règne eut quarante-cinq mille cinq cents ans de durée.

Pendant ces trois règnes qui embrassent une période de quatre-vingt-un mille ans, il n’est question ni de l’habitation ni du vêtement. L’histoire nous dit que les hommes vivaient dans des cavernes, sans crainte des animaux, et la notion de la pudeur n’existait pas parmi eux.

À la suite de quels événemens cet état de choses se transforma-t-il ? L’histoire n’en dit mot. Mais on remarquera le nom des trois premiers empereurs qui comprennent trois termes, le ciel, la terre, les hommes, gradation qui conduit à l’hypothèse d’une décadence progressive dans l’état de l’humanité. C’est sous le règne du quatrième empereur, appelé empereur des