et marins qui, lentement, un par un, y sont morts terrassés par les fièvres? En masse, ils eussent fait flotter depuis longtemps le drapeau français sur Tananarive, et nous n’aurions pas à recommencer aujourd’hui ce qui a été tenté là dans des conditions toujours insuffisantes. Il ne faudrait pourtant pas se dissimuler que l’expédition projetée ou en voie de préparation contre Madagascar, — si un accord n’a bientôt lieu avec les ennemis que nous y avons, — présente de très sérieuses difficultés. Chose étonnante! il n’a presque rien été dit à la chambre de l’insalubrité tristement célèbre de ses côtes, presque rien du manque absolu de routes si l’on veut pénétrer au cœur du pays, rien non plus de la valeur indiscutable des ennemis que nous aurons à combattre. M. de Mun, M. Périn, M. de Lanessan, ainsi qu’un député de la Réunion, l’honorable M. Bureau de Vaulcomte, ont, comme d’un commun accord, glissé sur ces points intéressans. C’était pourtant sur ces questions obscures qu’il fallait jeter le plus de clarté, et notre tâche consistera à réparer autant que possible cet oubli. Quant à l’opposition sourde que nous fait la Grande-Bretagne à Madagascar sous le couvert de ses pasteurs méthodistes, que pourrait-on en dire? L’assimiler à l’arrogante présomption des Célestes, d’après laquelle tous les royaumes de ce monde sont les tributaires de la Chine, comme tous les océans, toutes les mers, tous les isthmes, tous les archipels, doivent être, paraît-il, tributaires de l’Angleterre.
En ce moment, nous sommes dans une période de négociation avec nos ennemis, les Hovas de Madagascar. Que sont, en peu de mots, ces Hovas au moral et au physique? Répandus dans les vallées et sur les hauteurs du centre de l’île, les Hovas y sont venus de la Malaisie, sur une flottille et à une époque que l’on ne saurait déterminer avec précision, mais probablement avant l’hégire, puisqu’ils ne sont pas mahométans et que les descendans des Malais navigateurs et conquérans du XIIe siècle le sont encore aujourd’hui. Chassés de la côte occidentale par les maladies qui y règnent, ils formèrent dans des régions salubres un royaume central qui porte le nom d’Imérina. Tout-puissans sur la côte est, leur domination est précaire à l’ouest; mais ils ne prétendent pas moins à la domination entière du pays. Le teint de ces Hovas est jaune cuivré, comme celui des mahométans des îles Soulou; ils en ont les cheveux noirs et lisses, les dents blanches, les pommettes saillantes et les yeux relevés à l’angle extérieur. Quoique vifs, agiles,