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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 63.djvu/939

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comme c’était le cas, il y a peu de mois encore, par la présence intempestive et l’intervention occulte de la marine anglaise en faveur de nos ennemis. Qu’un traité avec les Hovas et autres tribus de Madagascar nous mette demain en possession d’une partie de l’île, pas une puissance n’osera contester notre suprématie, car nous l’aurons acquise sans basses intrigues et en vertu de droits éclatans comme le soleil.

Après une étude aussi approfondie que possible de la question de Madagascar, nous appuyant sur les relations les plus récentes des voyageurs, qu’il nous soit permis de donner ici, tout en nous résumant, notre humble avis sur la manière dont la campagne contre les Hovas doit être conduite. La première mesure à prendre est de renforcer notre station navale de la mer des Indes, qui, dans ces derniers temps, n’a été que de trois bâtimens. Par suite de la fin heureuse de nos discussions avec la Chine, cette station peut être portée sans inconvénient à douze vaisseaux. Ce chiffre suffira très largement à la surveillance de l’embouchure des grands fleuves, à empêcher toute relation des Hovas avec l’extérieur, à ruiner leur commerce, à éviter le débarquement des armes et des munitions qui pourraient leur être adressées d’Europe et principalement des ports anglais. Par le seul fait de la présence d’une force navale de cette importance sur les côtes de Madagascar, nous y aurions déjà, et dans d’excellentes conditions, un effectif de deux mille à deux mille cinq cents hommes, officiers et marins. Jusqu’à présent, c’est triste à dire, à Majunga comme à Tamatave, ce sont les Hovas qui bloquent par terre les quelques hommes que nous y avons ; leurs échanges s’y font avec autant de facilité que si nous n’étions pas en guerre avec eux. Il n’en pourra plus être ainsi avec un sévère blocus que fera observer une flotte relativement considérable. On ne verrait plus les Hovas, raillant notre impuissance et notre mansuétude, trafiquer comme ils le font encore sous nos yeux, à Vohemor, Fénérive et autres baies de leur île.

Le blocus bien établi, une croisière incessante organisée, il sera indispensable d’occuper les deux points les plus importans du littoral malgache, Majunga et le nord de Tamatave. A Majunga, il y a un fort, et, pour le mettre à l’abri de n’importe quel coup de main, il suffit d’une canonnière et d’une petite garnison. Cependant, pour en dégager les approches, il conviendrait d’occuper la petite ville de Macowoay, qui se trouve placée sur la rivière Betsibouka, à une cinquantaine de kilomètres de la mer. Là encore, une petite canonnière et quelques hommes qu’il faudrait relever souvent suffiraient pour se préserver de toute surprise. Mourourang, situé, comme Majunga, sur la côte ouest, devrait être aussi occupé.