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de la liquidation, par la défaite complète des vendeurs à découvert. Ceux-ci, atterrés pendant toute la première partie du mois d’août par la cruelle leçon qu’ils venaient de recevoir, ont cru trouver dans la rupture des négociations entre la France et la Chine une occasion de revanche. Il leur semblait impossible que le monde financier ne se laissât pas entraîner à de sérieuses appréhensions au moment où la force des choses et l’obstination de la cour de Pékin allaient contraindre la France à entreprendre une grande guerre dans l’extrême Orient. Ils supputaient les dépenses considérables où nous devrions nous engager, les efforts nouveaux que nous imposerait l’hostilité nettement déclarée d’un immense empire, que l’on avait peut-être, bien à la légère, traité de quantité négligeable, les difficultés, les complications internationales que ne manquerait pas de soulever une action vigoureuse de notre marine contre les ports chinois.

Les prévisions des baissiers ont paru d’abord justifiées. Nos fonds publics ont en quelques jours fléchi de près d’une unité. Les haussiers du mois dernier semblaient peu disposés à réagir contre des impressions qui n’étaient que trop naturelles et trop conformes à la réalité des faits : la baisse était commandée par les circonstances ; il fallait se soumettre à une évidente nécessité.

La rapidité des succès de l’amiral Courbet a cependant provoqué un nouvel et brusque revirement dans les dispositions du monde financier. Les acheteurs, après avoir concédé à leurs adversaires un premier avantage, ont repris l’offensive avec une extrême vigueur dès l’arrivée des premières dépêches annonçant la destruction de la flottille chinoise et de l’arsenal de Fou-Tcheou. La campagne contre les vendeurs, à la Bourse de Paris, a été menée avec la même décision et le même entrain que celle de l’amiral Courbet contre les Chinois de la rivière de Min. Celui-ci, le 29 août, sortait vainqueur des passes de ce fleuve, où l’ennemi avait espéré l’enfermer. Le 29 août, également, la spéculation à la baisse, mise en déroute, s’avouait vaincue et rendait les armes en rachetant avec précipitation tout ce qu’elle avait vendu il y a huit jours.

C’est le vendredi 30, en effet, que le mouvement de hausse a atteint son maximum. Le 3 pour 100 qui, de 78.50, avait reculé à 77.80, s’est élevé jusqu’à 79 ; l’amortissable a dépassé le cours rond de 80 ; le 4 1/2, de 107 francs, a rebondi à 108.25, cours coté il y a un mois, avant le détachement du coupon trimestriel.

Le lendemain cependant, jour de la réponse des primes, l’ardeur que les baissiers mettaient à se racheter s’est un peu calmée. Toutes les primes étaient levées ; il y a eu bien des positions à liquider immédiatement. Le 3 pour 100 a été ainsi ramené à 78.75 et le 4 1/2 à 108 francs. Les haussiers ont compris en outre la nécessité de ne pas