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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 65.djvu/473

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ses sympathies, qu’elle gardait toujours, avec sa discipline traditionnelle, la même habileté, la même ardeur à l’action. L’amiral Courbet, avec ses marins, a victorieusement accompli la mission qui lui avait été donnée de détruire les défenses chinoises dans la rivière de Min, l’arsenal de Fou-Tchéou, et ces combats, qui ont duré plusieurs jours, n’ont pas laissé d’être meurtriers ; de braves gens, comme le jeune lieutenant Bouet-Willaumez, qui portait un nom illustré dans la guerre de mer, ont payé de leur vie le succès de nos armes. M. l’amiral Courbet a conduit cette affaire avec autant de sang-froid que de vigueur ; puis il a quitté les eaux du Min pour aller montrer son pavillon à l’île de Formose, devant Kelung, qui paraît être un des gages que nous devons prendre. Jusqu’ici, depuis le bombardement de Fou-Tchéou, l’escadre française ne s’est pas portée sur d’autres points et n’a pas eu de nouveaux combats à livrer ; elle se prépare sans doute à reprendre sa campagne. Sur quel point des côtes chinoises dirigera-t-elle maintenant ses coups ? L’action des forces navales se lie évidemment, dans une certaine mesure, à l’action du corps expéditionnaire qui est au Tonkin, qui est appelé à reprendre un rôle plus décidé si les événemens se développent.

Sur mer, dans tous les cas, nos affaires restent en bonnes mains, sous la direction d’un homme aussi prudent que résolu, qui n’agit pas à la légère et ne parle pas inutilement. Au Tonkin, le seul acte sérieux et significatif depuis quelques jours est le rappel devenu nécessaire du chef de notre petite armée, de M. le général Millot, dont la présence à la tête des forces françaises n’était plus qu’un danger. La vérité est que M. le général Millot s’est montré insuffisant dans son commandement, inconsistant et brouillon dans ses relations avec la marine aussi bien qu’avec ses lieutenans, imprévoyant dans les opérations. Les succès qu’il a obtenus, il les avait trouvés tout préparés ; ce qu’il a voulu tenter de lui-même ou pour suivre des instructions se réduit à cette triste aventure de Lang-Son, dont il garde la responsabilité, qui, d’après tout ce qu’on sait aujourd’hui, a été plus malheureuse encore qu’on ne l’avait cru. M. le général Millot a fait ce qu’il pouvait faire de mieux en invoquant sa santé pour être relevé d’un poste pu il ne pouvait plus rester. Son successeur n’est autre qu’un des commandans de brigade du corps expéditionnaire, M. le général Brière de ; l’isle, qui paraît avoir pour mission principale de maintenir la situation au Tonkin, de la défendre, au besoin, contre les irruptions chinoises.

En quoi maintenant consisteront des opérations qui ne peuvent être efficaces que si elles s’engagent dans des conditions sérieuses, et surtout si l’on se décide à mettre quelque unité dans la direction de nos affaires ? Tout dépend de ce que veut le gouvernement, et sans doute aussi en partie des résolutions que la Chine peut prendre d’un jour à l’autre. Une déclaration de guerre, qu’elle vînt de la Chine ou de la