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Vogt, protestèrent noblement contre cette violence. Il en admira tout de suite la logique et la beauté, et jamais il ne manqua une meilleure occasion de se taire. Aux transports de joie il mêla l’hypocrisie de la pitié, et aux jérémiades les cantiques. Comme Le geôlier de don Carlos, il disait : « Paix ! paix ! C’est pour votre bien. « Il vida sur les blessures saignantes de l’Alsace tout un flacon de son eau bénite, dont il n’avait jamais fait un si triste usage, et sa cafardise parut plus odieuse aux Alsaciens que toutes les bombes du général Werder. Il n’est pas dans ce monde de figure plus répugnante que celle d’un bourreau sentimental et doucereux.

Ce fut pour justifier ses faciles et joyeuses résignations qu’il composa son trop célèbre Walifmd. Le héros de ce roman, qui n’eut qu’un médiocre succès, est un démocrate de 48, qui, comme Auerbach lui-même, s’arrange très bien de tout ce qui arrive. Il use son chapeau à force d’y porter la main pour saluer tous les événemens qui passent. Il ne renie pas ses principes ; mais il estime que les peuples se trouvent bien de donner carte blanche à la Providence, représentée par un grand homme, qui se charge de régler les choses pour le mieux. « Comme Guillaume Tell, dit-il, nous avons longtemps caché dans notre sein la flèche de la révolution ; nous avons enfin tiré, et nous avons manqué le but. » Il est heureux de son malheur, il a vu a les canons prussiens délivrer le monde de l’esclavage de la phrase française, » il les a vue sauver à Sedan les lumières du siècle, la civilisation, la justice, les bonnes mœurs, l’honneur et la probité. » À quelque temps de là, une grande maison de librairie de Paris écrivait en allemand à Waldfried-Auerbach, pour lui témoigner son désir de publier une édition illustrée d’une de ses nouvelles. « Je ne peux te dire, écrivait-il à son cousin, combien je suis fier de penser que mon livre, sous cette forme nouvelle, va pénétrer dans le monde entier. C’est un événement qui n’a pas seulement pour moi une valeur personnelle et littéraire ; c’est le premier regard de paix que nous jette la France. » Un peu plus tard, il eut la satisfaction d’apprendre que, depuis la révision des programmes, ses romans villageois figuraient parmi les livres qui servent à l’enseignement de la langue allemande dans les lycées français. Il conclut de cette aventure que les Français avaient du bon il daigna se souvenir « que la France avait joué un certain rôle dans l’histoire de la civilisation. Il l’avait su, il l’avait oublié. Il se croyait un chêne de la forêt de Teutoburg ; ce chêne n’était qu’un roseau qui pliait à tous les vents.

Toutefois, il y aurait de l’injustice à ne voir dans la facilité avec laquelle il s’accommodait des faits accomplis qu’une souplesse de courtisan ou un calcul intéressé. Parmi les Waldfried dont la sagesse consiste à déclarer que le facilité château de monseigneur le baron le plus