de si instructifs échantillons. Ses lettres ne faisaient alors que de paraître en Angleterre. Il semble bien qu’elles seraient dignes, comme les Voyages d’Arthur Young, dont on a déjà dit qu’elles formaient comme la contre-partie, d’être traduites en français. Voici encore Karamsine, le grand historien russe, un peu jeune alors, il est vrai, e£, par conséquent facile à l’enthousiasme. Ses lettres sur la France ont été traduites une première fois, et une Revue spéciale les retraduit en ce moment même. Elles aussi, datées qu’elles sont de 1790, « très intéressantes, » eussent occupé, ce semble, assez convenablement, la place que M. Babeau n’a pas craint d’accorder à Smollett.
Car, en réalité, s’il y avait un sujet sous le titre de M. Babeau, c’était uniquement celui-là. « Lorsque l’on veut connaître l’état social d’un peuple à une époque déterminée, nous dit-il lui-même, il est nécessaire de faire appel à tous les témoignages. » C’est le premier mot de son Introduction. Et voici le dernier de sa Conclusion. « A tout prendre, au point de vue matériel comme au point de vue intellectuel, la France du XVIIIe siècle avait une supériorité sensible sur les autres nations civilisées. » Pourquoi donc la révolution, cette révolution toute française, en un certain sens, et cependant européenne aussi, quoi qu’en ait M. de Sybel, a-t-elle éclaté de préférence en France ? Parce que la misère y était plus profonde ou plus universelle qu’en Espagne ou en Italie ? Parce que le gouvernement y était plus tyrannique ou plus corrompu qu’en Allemagne ? Parce que l’égalité y était moindre qu’en Angleterre ? Ou peut-être parce qu’on y jouissait de moins de liberté qu’en Russie ? Non du tout, mais, comme l’a dit Tocqueville avec sa pénétration singulière, parce que, malgré les abus, la condition générale des hommes, de ceux du dernier rang comme de ceux du premier, y était plus douce que nulle part en Europe. Qu’il s’en soit rendu compte ou non, c’est là, dans ce livre sur les Voyageurs en France jusqu’à la révolution, ce que M. Babeau s’est efforcé de prouver par le témoignage des étrangers ; et tout ce qui ne s’y rapporte pas n’est qu’ornement inutile, si l’on veut, et pour nous, superfétation pure.
Nous avons vraiment en France, de tout temps un peu, mais surtout depuis tantôt cent ans, une singulière façon d’écrire notre histoire. Admettons que la faute en soit pour une part à quelque disposition fâcheuse du caractère national ; mais n’en serait-elle pas autant à notre ignorance de l’histoire des nations voisines ? ou encore, si l’on aime mieux cette autre façon de dire à peu près la même chose, pourquoi, quand nous jugeons les nôtres, le faisons-nous sans égard au temps, aux conditions, au milieu dans lequel ils ont vécu ? « La justice criminelle ordinaire, a dit quelque part Macaulay, ne connaît pas les compensations. Un homme qui a vendu de la bière le dimanche matin