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LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Les rentes françaises ont été, pendant la dernière quinzaine, l’objet d’un vif mouvement de hausse, qui n’a pu cependant se poursuivre jusqu’à la liquidation. Le facteur principal en était l’embarras où le découvert se trouvait placé, par suite de l’extinction rapide de l’épidémie cholérique à Paris. Aussitôt que les chiffres publiés dans les bulletins quotidiens eurent permis d’espérer que le fléau ne prendrait pas un développement vraiment inquiétant, les haussiers ont commencé à relever les cours. Ce retour offensif a été mené avec une telle vigueur que le 4 1/2, qui reste toujours le grand régulateur de notre marché, a été porté sans interruption de 107.40 à 108.85. Les acheteurs étaient, en outre, encouragés par les illusions où certaines dépêches entretenaient l’opinion publique que, grâce à la médiation de l’Angleterre, le conflit franco-chinois allait être brusquement tranché par un arrangement pacifique.

Les haussiers ont dû reconnaître toutefois qu’ils étaient allés trop loin. Il leur a fallu céder et devant l’importance des réalisations de bénéfices d’acheteurs amplement satisfaits, et devant la démonstration de l’inanité des espérances de pacification. L’influence de la situation de place s’est fait alors impérieusement sentir : les rachats des vendeurs étaient à peu près terminés ; le comptant, qui avait, pendant la première partie du mois, constamment soutenu les acheteurs, retirait peu à peu son concours ; l’argent tendait à se resserrer à Londres et à Paris ; enfin la chambre abordait, après de nombreux tiraillemens dans la commission, la discussion des crédits du Tonkin, et, bien que le sort du ministère parût hors de cause, la gravité de la situation créée par les exigences et les prétentions de la Chine imposait à la spéculation une attitude de réserve et de circonspection.

Un mouvement de retraite sur les fonds publics était donc indiqué ; il s’est effectué lentement, sans secousse violente, ramenant le 4 1/2 de 108.85 à 108.40, tandis que les deux 3 pour 100 suivaient pas à pas les fluctuations du fonds principal de spéculation. Même l’issue, favorable au ministère, du débat sur les crédits et le vote à près de 100 voix de majorité d’un ordre du jour de confiance n’ont amené aucun changement dans les portions respectives prises sur le marché