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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 66.djvu/779

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heure à être à la mode. Scipion y venait déjà s’y reposer avec ses amis et y goûter ce plaisir, qui a tant de charme, de se faire jeune un moment quand on se sent à la veille de devenir tout à fait vieux ; la tradition aimait à montrer Lœlius et lui jouant comme des enfans avec des coquilles sur le bord de la mer. L’orateur Hortensius possédait aussi à Lauréate une villa célèbre dont Varron nous parle avec admiration. Elle comprenait un bois de plus de cinquante jugères (12 hectares), où l’on trouvait une grande abondance de bêtes que l’on avait habituées à se réunir au son de la trompe, ce qui permettait au propriétaire d’offrir à ses hôtes, pendant le repas, un divertissement fort curieux. Le dîner était servi sur une colline ; on faisait venir un artiste vêtu en Orphée, avec la longue robe et la cithare ; à un signal, pour compléter l’illusion, l’artiste sonnait de la trompette, et l’on voyait accourir de tous les côtés des cerfs, des sangliers, et tous les animaux de la forêt. « C’était, dit Varron, un spectacle aussi beau que celui qu’on a dans le grand cirque, pendant les jeux donnés par les édiles, ou que les chasses qui se font avec des bêtes d’Afrique. » Mais de toutes ces maisons de campagne où les grands seigneurs de Rome passaient une bonne moitié de leur vie, aucune ne nous est aussi bien connue que celle de Pline. Sous prétexte de persuader son ami Gallus de venir le voir, il lui en fait, dans une lettre célèbre, une description détaillée qui la met entièrement sous nos yeux. La lecture de cette lettre est du plus grand intérêt pour tous ceux qui veulent avoir quelque idée des magnifiques villas romaines. On voit à quel point tout y est ménagé pour la commodité de la vie. Il n’y manque, à notre gré, qu’un parc et des terres : une aussi belle maison aurait eu besoin d’être mieux entourée. Pourtant Pline la préfère à toutes ses autres villas, précisément parce qu’il n’y est pas occupé des soucis de la propriété, qu’il s’y trouve plus libre, plus à l’aise, et que n’étant distrait par rien, il y travaille mieux qu’ailleurs. « Ici, dit-il, je n’entends personne dire du mal des autres, et moi-même, je ne médis de personne, si ce n’est de moi, quand je ne suis pas content de ce que j’ai fait. Ici, j’échappe à la crainte et à l’espoir, je me moque de tout ce qu’on peut dire. Je ne m’entretiens qu’avec moi et avec mes livres. O la douce et la bonne vie ! L’agréable repos qui vaut bien mieux que ce qu’on honore du nom de travail et d’affaires ! O mer, ô rivages, mes vrais cabinets d’étude ! Quelle source d’inspiration vous êtes pour moi ! » Nous savons aussi sûrement que possible où devait être la villa de Pline, il a pris la peine de nous en indiquer l’emplacement avec tant de précision qu’il n’y a pas moyen de s’y tromper : il nous dit qu’elle est au bord de la mer, à 17 milles (25 kilomètres) de Rome ; qu’on peut s’y rendre par la via Ostiensis et la via Laurentina, mais qu’il faut quitter la